Coup de coeur
3étoile(s) 3étoile(s) 3étoile(s) 3étoile(s) 3étoile(s)

Coup de coeurWOLKE 9

Andreas Dresn ( Allemagne - distributeur : CNC)

Ursula Werner, Horst Rehberg, Horst Westphal, Steffi kühnert

98 min.
26 novembre 2008
WOLKE 9

Deux corps se rencontrent. Illuminés par une chaude lumière d’été, ils s’enlacent avec douceur et intensité. C’est une image belle et envoûtante qui s’étale à l’ouverture de « Wolke 9 », l’image de deux personnes s’aimant simplement. Sauf que cette étreinte a quelque chose d’inattendu, d’inhabituel. Car les corps qui la composent sont marqués par les années, par les heures et les jours passés. C’est la rencontre charnelle de Inge, la soixantaine et de Karl, 78 ans.

Porter à l’écran la rencontre amoureuse et érotique d’un couple de sexagénaires est un fait rare au cinéma. La vision de corps marqués par le temps, de peaux telles des livres ouverts, miroirs d’un parcours, d’un trajet de vie, a quelque chose d’une force rare, inexplicable. Leur simple monstration implique une histoire, un témoignage du temps qui les a forgé, de la vie qui a été la leur.

Ces corps qui s’allongent côte à côte sont exposés d’une façon dépouillée, épurée. Pour Andreas Dresen, il n’y a pas de tabou à montrer des sexes vieillis, des embrassades sur l’entièreté de ces corps parchemins. Au contraire, le réalisateur examine sans pour autant brusquer cette sexualité du troisième âge. Il l’observe de son œil caméra et la restitue sans fard, sans effet, simplement pour ce qu’elle est.

Parce que ce dont il est question dans « Wolke 9 » est bien une histoire d’amour. Le fait qu’une femme de soixante ans puisse encore être sujette à un coup de foudre, à une rencontre qui la foudroie et qui la dépasse. Parce qu’elle est mariée. Parce qu’elle bouscule toute une homéostasie familiale. Parce qu’elle assume et revendique ce droit à l’amour, malgré son âge et sa situation.

Au-delà du fait charnel, Andreas Dresen montre à quel point il est complexe pour une femme âgée de sortir du carcan dans lequel la société l’enferme. Se dégager des coutures qu’elle fait pour tromper son ennui, des voyages en train accompagnée de son mari, des gardiennages des petits enfants pour oublier que l’on devient vieux, que l’on est de plus en plus isolés, de plus en plus inutiles.

Cet amour soudain et inattendu la réveille brusquement et magnifiquement, mais il bouscule aussi toutes les idées reçues, toutes les habitudes. Si Inge a la force d’assumer ses choix, ce ne sera pas le cas de tous. Le refus des conventions de la dame entraine malgré elle des êtres chers vers une chute qu’elle ne désirait pas.

Pourtant ce septième ciel qu’elle atteint dans les bras de Karl se pose comme une évidence, tant dans le récit que dans l’image. Il y a comme un espoir indescriptible à les voir ensemble malgré les entraves jetées sur leur parcours. On sort de « Wolke 9 » avec la sensation d’avoir été frôlé par la plume d’un ange, une impression infime et néanmoins chargée de sens. (Justine Gustin)