Peter O’Toole, Leslie Phillips, Jodie Whittaker, Vanessa Redgrave
Le plus tonique des viagras serait-il, pour un homme âgé, de rencontrer une jeune fille ?
Question dont l’intérêt ne s’est jamais démenti depuis les temps bibliques égayés par d’alertes historiettes (*) consacrant le pouvoir de la gente féminin en son printemps à rallumer, chez le vieillard, les ardeurs d’antan.
Au cinéma, le thème de la différence d’âge est une mine dont les pépites sont parfois des métaux précieux - « Breezy » de Clint Eastwood, « Le genou de Claire » de Rohmer, « Le dernier tango à Paris » de Bertolucci, "Harold et Maude" de Hal Ashby.
Avec « Venus », malgré Hanif Kureischi (**) aux commandes du scénario et Peter O’Toole, la pépite est plombée.
Vulgarité, visquosité gestuelle et lourdeur langagière, sont au rendez-vous de cette fin de vie d’un
ancien acteur, Maurice, dont le quotidien est secoué par sa rencontre avec la nièce à peine vingtenaire de son meilleur ami.
Kane dans « The citizen » d’Orson Welles était à la recherche d’un mot (Rosebud), Maurice dans « Venus » est à la recherche d’un émoi. Le dernier sans doute mais le plus équivoque certainement.
Les références shakespeariennes, le tableau de Vélasquez « Vénus » qui donne au film son titre et à la jeune fille son surnom, la présence de Vanessa Redgrave ne réussissent pas à insuffler à ce face-à-face entre un désir qui s’installe et une mort qui approche, une émotion et une conviction.
Au contraire, ce tryptique de qualité souligne, par contraste, la languide mais tenace impression
de poisseux (physique et moral) qui atmosphère le film. On est loin de la gentillesse tendre avec laquelle Marcello Mastroianni, dans le nostalgique "Voyage au début du monde" de Manoel de Oliveira, interrogeait, une ultime fois, le monde et ses beautés.
Peter O’Toole était, aux Oscars 2007, nominé pour son rôle dans « Venus », en tant que prétendant à la qualité de meilleur acteur. Le fait qu’il n’ait pas reçu la statuette convoitée est la preuve bienvenue que le cinéma sait encore reconnaître, parmi les siens, le meilleur - Forest Withaker, lauréat pour "The last king of Scotland " de Kevin Macdonald - du moins bon.(***)
Depuis cette prestation gangrenée par d’insidieux courants décadents, Monsieur O’Toole s’est heureusement distingué en prêtant sa voix à Anton Ego, le critique gastronomique du délicieux « Ratatouille ».
Une variation sur ce même thème de "la dernière fois" est proposée, actuellement sur les écrans par un Jan Decleir qui, dans "Man zoekt vrouw" de Miel Van Hoogenbemt, nourrit son personnage d’une humanité moins crépusculaire. (m.c.a)
(*) Agar et Abraham (Genèse 21), Suzanne et les vieillards (Daniel 13, 7-23) dont la riche iconographie (le Tintoret, Rubens, Rembrandt, Doré, Chassériau, Albérola …) est le reflet de la permanence d’un certain type de rapport entre les grand et tendre âges.
(**) dont la patte (« My beautiful laundrette », « Sammy & Rosy get laid ») se reconnaît aisément dans son approche d’un Londres économiquement et socialement peu favorisé.
(***) cette appréciation sur Peter O’Toole est à circonscrire à son interprétation du personnage de Maurice. Lorsqu’il a été nominé pour ses prestations dans « Lawrence d’Arabie », « Becket » ou encore « The lion in winter », on aurait apprécié qu’il sorte vainqueur de la compétition.