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TITANE

Julia Ducournau

Vincent Lindon, Agathe Rousselle, Garance Marillier

109 min.
28 juillet 2021
TITANE

Après une série de crimes inexpliqués, un père retrouve son fils disparu depuis 10 ans. Titane : Métal hautement résistant à la chaleur et à la corrosion, donnant des alliages très durs.

Révélée par « Grave » (2016) qui explorait le rapport au corps à travers le passage à l’âge adulte sur fond de cannibalisme, la réalisatrice française Julia Ducournau nous revient avec un second long-métrage « Titane », qui vient bousculer les genres, qu’ils fassent échos à l’identité de genre ou au cinéma de genre. Véritable expérience cinématographique visuelle et sensorielle, le film a remporté la Palme d’or lors du dernier Festival de Cannes, décerné par un jury présidé par Spyke Lee. Julia Ducournau devient ainsi la deuxième femme à obtenir le précieux sésame, 28 ans après Jane Campion pour « La leçon de piano ».

D’emblée, le film s’engage dans la voie de l’horreur entremêlant une série de sous-genres allant du slasher au rape and revenge movie, en passant par le body horror. Alexia (Agathe Rousselle) victime dans son enfance d’un accident de voiture, vit avec une plaque en métal dans le crâne. Hypersexualisée dans un premier temps, on la voit danser de manière érotique sur le capot d’une voiture, attirant le regard des hommes. Cette hétérosexualité est rapidement éconduite par sa préférence pour les femmes et une étonnante scène de sexe avec une voiture, dont il en résultera une grossesse. Le rape and revenge movie apparaît dès le premier meurtre où Alexia enfonce dans l’oreille de son agresseur un bâton à cheveux japonais. S’en suit une série de meurtres ultra violents qui nous laissent peu de répit et puis tout à coup, le film bascule vers autre chose. Alexia modèle son corps, passant du féminin au masculin, pour devenir Adrien, le fils disparu de Vincent (Vincent Lindon,) un commandant sapeur-pompier bodybuildé. Les retrouvailles entre ces deux êtres abîmés transforment le film en un mélodrame et la critique des stéréotypes de genre n’y est que plus flagrante. Un homme viril peut tout à fait apparaître comme étant sensible, tout comme une jeune femme sensuelle peut se révéler être une meurtrière hyper violente. Le film continue alors d’évoluer, passant d’un genre à un autre tout comme le personnage d’Alexia/Adrien, jusqu’à cette scène finale qui nous fait chavirer vers l’univers du fantastique avec la naissance d’un bébé hybride.

On peut aimer ou détester « Titane », mais on ne peut nier sa puissance tant sur le fond que sur la forme. Le film fait voler en éclat les cases dans lesquelles on tenterait de l’enfermer, tout comme ses personnages. Nul se limite à un genre, chacun est libre d’être ce qu’il souhaite, d’aller et venir. Avec « Titane », Julia Ducournau souffle un vent de renouveau sur le cinéma français en créant de nouvelles possibilités et ces innovations reflètent sans aucun doute les évolutions sociales de notre temps.

(Nathalie De Man)