Drame sentimental
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Coup de coeurTHE SECRET LIFE OF WORDS

Isabel Coixet (USA 2006 - distributeur : KFD)

Sarah Polley, Tim Robbins, Julie Christie

115 min.
3 mai 2006
THE SECRET LIFE OF WORDS

Une histoire qui commence doucement, presque sur la pointe des pieds.
Hanna est ouvrière à la chaîne. Travail qui colle au plus près de sa personnalité renfermée, sourde (au sens propre et figuré) et adonnée autant à la routine professionnelle qu’à celle, plus obsessionnelle, de se laver les mains avec des savons identiques et pré-emballés.. Geste métonymique qui rappelle celui de Jean-Louis Trintignant qui dans « Sans Mobile Apparent » devait se laver après tout contact, aussi futile et bref soit-il, avec autrui.

Un hasard, de la nature de ces coïncidences qui recèlent un potentiel insoupçonné de guérison, va la conduire à devenir l’infirmière de Joseph, ouvrier sur une plate-forme pétrolière (*), brûlé et momentanément aveuglé suite à un accident de travail.

Dans ce lieu clos, rythmiquement battu par les vagues, perdu quelque part dans la mer d’Irlande, quelque chose, proche d’une ré-appropriation du sens de la vie, va se tisser entre ces deux là.

Lui quittera son cynisme et sa trivialité pour lui révéler une douleur faite de honte et de culpabilité.
Elle abandonnera son mutisme et son calme trop cadenassé pour lui raconter ce qui lui est arrivé lorsqu’elle habitait près de Dubrovnik au moment de la guerre des Balkans.

Isabel Coixet, qui déjà dans « Ma vie Sans Moi » avait réussi à allier imprévisibilité et sensibilité,
impressionne par la maîtrise de sa mise en scène qui rend à la fois un intense sentiment d’isolement et le lent glissement du temps qui va le grignoter.

Sarah Polley est magnifique dans ce rôle d’Hanna qui intrigue et émeut tout à la fois. Peut-on voir dans son duo avec Coixet l’ébauche de cette alliance qui avait fait la richesse de quelques relations cinématographiques duelles et féminines : Sandrine Kiberlain/Laetitia Masson ; Valéria Bruni Tedeschi/Laurence Ferreira Berberosa ; Lio/Marion Vernoux ; Nathalie Baye/Jeanne Labrune

Tim Robbins est, lui aussi, excellent en héros à la marge dont l’apparence loubarde est démentie par une indicible douceur.

Le regard de la réalisatrice, loin de tout pathos ou sensiblerie, se pose, avec une retenue qui suscite l’émotion, sur un face-à-face entre deux meurtris par la vie et par l’Histoire, qui ré-apprendront, pour l’un, à voir plus généreusement, pour l’autre à oser entendre ce qui était devenu interdit : la possibilité d’un bonheur à venir

(*) baptisée Genefke du nom de la fondatrice de l’organisation qui s’occupe de réhabiliter les victimes de la torture.