Anna Odell, Rikard Svenson, Anders Berg, Robert Fransson, Sandra Andreis, Niklas Engdahl
Jouant sur une triple mise en abyme, The Reunion
mélange fiction et docu-fiction afin d’explorer la question du
harcèlement collectif en milieu scolaire ( bullying ) et de ses
conséquences sur l’évolution d’un groupe d’individus, une fois parvenus à
l’âge adulte. Tiré de l’expérience personnelle de sa réalisatrice, le
film investigue, à travers la confrontation de la réalité et de la
fiction, la dynamique de groupe, la hiérarchisation sociale qu’elle
induit, les rapports de force qui se créent et les impacts
comportementaux qu’elle provoque. Le subtil jeu de miroirs mis à l’œuvre
dans The Reunion examine également avec acuité et une très grande
perspicacité la perception mutuelle des individus au sein d’un même
groupe, et l’influence déterminante du regard d’autrui sur leur
évolution identitaire et sociale. Scindé en deux volets distincts, The
Reunion mesure l’imaginaire à la reconstitution de faits avérés selon
les dires de la réalisatrice (lire à ce sujet notre interview de Anna Odell : http://www.cinefemme.be/interview.php?ivw=70 ).
L’originalité de la mise en scène dévoile petit à petit l’intime vérité
que les membres d’un même groupe détiennent ou croient détenir sur
eux-mêmes et à l’égard des autres.
L’idée du film est née lorsque l’artiste plasticienne
suédoise Anna Odell apprend qu’elle n’a pas été invitée à une réunion
d’anciens camarades de classe. Victime de harcèlement collectif
( bullying ) dans le cadre scolaire par le passé, elle s’intéresse depuis
longtemps à la dynamique de groupe et à ses impacts humains et sociaux.
N’ayant pas eu l’occasion de rencontrer ceux qui lui ont fait subir
brimades et humiliations, elle décide de faire un film en deux parties,
l’une reposant sur la fiction, l’autre sur la docu-fiction.
Premier volet : pur fruit de l’imaginaire de Anna Odell,
la fiction met en scène ce qu’il serait advenu si elle avait été
présente à cette fameuse réunion de retrouvailles. Jouant son propre
rôle, Anna Odell s’adresse à ses anciens camarades (incarnés par des
comédiens professionnels) pour leur faire part de la lutte constante
qu’a été la sienne pendant ses années scolaires. La fiction mène au
drame.
Second volet : entourée par une équipe, Anna Odell tente
de rencontrer ses anciens compagnons de classe et de les confronter au
film qu’elle a mis en scène. Tirée, selon la réalisatrice, des réels
entretiens qu’elle a pu obtenir avec ses condisciples, la docu-fiction
(elle aussi jouée par de vrais acteurs) reconstitue et place en
vis-à-vis les réactions imaginées et les comportements qu’a
effectivement suscités la projection de son film.
Bien qu’abordant une problématique qui lui est très intime
et qui, selon les confidences de la réalisatrice, a affecté ce qu’elle
est devenue, et fait encore aujourd’hui partie intégrante de ce qu’elle
est, Anna Odell prend le soin de ne pas faire de son film un règlement
de compte narcissique. Certes, l’artiste y joue son propre rôle et cette
mise en scène d’elle-même constitue l’élément catalyseur du film, mais
The Reunion s’inscrit avant tout dans une démarche artistique innovante.
Explorée à 360°, la thématique du harcèlement collectif déborde
largement le cadre d’un vécu égocentré. L’originalité et le soin de la
mise en scène, l’irréprochable jeu d’acteurs, l’utilité sociale de son
sujet ainsi que sa pertinente actualité, concourent assurément à faire
de The Reunion un film résolument moderne susceptible de s’attirer les faveurs d’une très large audience (*).
( Christie Huysmans )
(*) The Reunion a obtenu le Fipresci Prize for
best debut film . Grand vainqueur du Brussels Film Festival , il a obtenu
le White Iris Award, the Fedex Cinehile Award et the RTBF TV Prize of
Best Film .