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SUMMER 1993

Carla Simón

Laia Artigas, Paula Robles, Bruna Cusí, David Verdaguer…

97 min.
19 juillet 2017
SUMMER 1993

Barcelone, été 1993. Frida vient de perdre sa mère et se retrouve orpheline. Du haut de ses 6 ans, elle doit quitter la ville pour aller vivre à la campagne, avec son oncle, sa tante et leur petite fille Anna de 4 ans. “Summer 1993” est un film intimiste empreint du vécu de la réalisatrice. Pour son premier long-métrage, Carla Simón, nous plonge en effet dans sa propre histoire familiale ; une histoire qu’elle a tellement racontée, qu’elle en est presque devenue une légende. Carla Simón explique avoir commencé à écrire les images qu’elle avait en tête, un mélange d’éléments de sa mémoire avec des histoires familiales et une bonne partie d’imagination. Si le film n’a pas une structure bien définie dans le sens d’une narration classique, il s’agit avant tout de garder l’effet de “petits moments” marquants qui représentent ce premier été dans sa nouvelle famille. Carla Simón a voulu dépasser sa propre expérience et prendre du recul en développant le point de vue de chacun des protagonistes de cette histoire.

Si le film nous parle de manière très juste de la perte des parents lorsqu’on est enfant, il dépeint également une période de l’Histoire de l’Espagne. L’Espagne de la transition, celle de la génération des parents de la réalisatrice, qui s’est opposée aux anciennes valeurs, aux traditions et à la religion. Une génération de “néo-ruraux”, soit des citoyens urbains qui sont allés vivre à la campagne pour des raisons politiques, économiques ou liées à des croyances personnelles. Cette période de liberté a également vu naître le fléau de la drogue, notamment de l’héroïne, qui s’est accompagné de celui du SIDA. Bien que ce ne soit pas explicitement dit dans le film, on comprend que le sang de Frida pourrait être infecté d’une maldie mortelle. Cette réalité a eu des conséquences sur la génération suivante, celle de Carla Simón, qu’elle met en lumière dans son film.

Il s’agit d’un film d’apprentissage, non seulement pour Frida qui doit s’adapter à une nouvelle réalité, mais pour chacun d’entre eux. Frida doit changer ses repères de citadine pour s’intégrer à la nature. Confrontée à des sentiments inconnus, telle la jalousie envers sa nouvelle petite soeur, Frida observe, explore et comprend que rien ne sert de fuir, qu’il vaut mieux affronter les problèmes afin de les surmonter et trouver un nouvel équilibre. Chacun doit se remettre en cause, car ils doivent transformer leurs relations familiales existantes pour en créer des nouvelles et réinventer une façon de vivre ensemble. Aimer l’autre et pouvoir être aimé à nouveau.

La beauté et la justesse du film reposent sur son réalisme. Sans jamais être larmoyant, c’est dans la simplicité des moments apparemment anodins que se révèlent des choses importantes. Le jeu d’acteur va dans ce même sens et nous donne à voir, avec beaucoup de lucidité, les failles dans les comportements humains, les moments de joie, les contrariétés et tous ces sentiments que l’on doit apprendre à dompter. La liberté que la réalisatrice a donné au jeu d’acteur des deux fillettes, très intuitives et à même de comprendre les situations, donne lieu à un jeu très naturel. C’est un réel plaisir de voir un film traiter d’un sujet lourd et don’t on parle peu, avec autant de fraîcheur.

Luz