Drame
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SEVEN POUNDS

Gabriele Muccino

Will Smith, Rosario Dawson, Woody Harrelson, Michael Ealy, Marry Pepper...

123 min.
14 janvier 2009
SEVEN POUNDS

La seconde collaboration (1) entre Gabriele Muccino, réalisateur ayant fait ses premières armes dans son pays natal, l’Italie, et Will Smith, acteur charismatique à la carrière hétéroclite, se révèle être une fresque réussie sur l’existence.

L’acteur y joue un certain Ben Thomas, agent du fisc qui serre dans ses mains une liste de sept noms, et qui suit un plan bien échafaudé, une trajectoire que lui seul semble connaître. Derrière un visage impassible pourtant se devine un mal qui le ronge de l’intérieur et qui à aucun moment ne le quitte.


Malgré la rigueur de la quête dont il ne veut dévier, il existe des évènements qui se dessinent, mis en jeu par une force supérieure, de l’ordre de la destinée peut-être. L’un des noms sur sa précieuse liste est celui d’Emily, une femme qui souffre d’une faiblesse cardiaque et dont les jours sont comptés. Une femme affaiblie par la maladie, mais grandie d’une profonde humanité.

L’implication imprévue et l’intérêt de cette femme pour lui vont bouleverser Ben, habité de non-dits et freiné par les limitations qu’il s’impose. Le besoin de rédemption de ce héros de nos temps post-modernes, doué d’une grande sensibilité, propose la représentation d’un homme qui, paradoxalement, gagne en masculinité à travers les failles qu’il laisse transparaître. Pourtant, Emily voit en lui une lueur profondément humaine. Et leur rencontre, celle de la générosité et de la culpabilité, présage le pire, ou le meilleur.


« Sept Vies » se plante d’abord comme un puzzle, présentant ce héros, à différents moments de sa vie, moments que le spectateur ne peut, lors des premières séquences, recoller les uns aux autres. Mais très vite les pièces se mettent en place et l’intuition du spectateur lui laisse entendre que le mystère est ailleurs. La reconstruction d’ailleurs, voire l’anticipation des évènements de la narration, ne pose aucun problème. Cette temporalité tourmentée, dont on ne sait pas exactement où elle commence ni où elle finit, se fait plutôt miroir du protagoniste.


En effet, l’approche formelle trouve sa raison d’être lorsqu’elle est lue au niveau de l’émotionnel. Le suspense ici ne dépend aucunement de ressorts narratifs mais plutôt des profondeurs de la psyché humaine. Car il s’agit avant tout d’un film sur l’humanité. Objectivement, sans doute y a-t-il à redire sur quelques aspects de ce mélodrame mosaïque, notamment au niveau des clichés formels directement inspirés du cinéma hollywoodien contemporain ou au niveau d’un penchant pour un sentimentalisme aigu.


Aussi, les raccourcis stylistiques et le mode de narration déplairont peut-être à certains. Sauf s’ils se laissent bercer par ces plaisirs visuels ou par la sensorialité rare qui est ici mise en jeu. Car l’image donne naissance à une sensorialité en ébullition. Tout n’est que sensation, du vent qui caresse les hautes herbes, au soleil qui réchauffe la peau, en passant par la sensation tactile que procure le toucher d’un être aimé ou celle d’une larme qui humidifie une joue.


Ce film se rattache à un cinéma qui aborde les questions existentielles de l’Homme. Il offre une parabole sur la vie et sur le sentiment de perte, une quête de la rédemption qui nous en apprend sur nous-mêmes, sur les autres. Et l’on en ressort grandi. (Ariane Jauniaux)

1 Après « The Pursuit of Happiness » (2006)