Gérard Depardieu, Benoît Poelvoorde, Vincent Lacoste
Au
vu des millésimes trop souvent bouchonnés auxquels le cinéma français
nous a habitués en matière de comédie ces dernières années, Saint-Amour fait
figure de grand cru. Avec sa belle cuvée d’acteurs (Gérard Depardieu,
Benoît Poelvoorde et Vincent Lacoste), ce film, très chaleureusement
accueilli hors compétition à la 66ème Berlinale, nous fait vivre un road
movie à la française en nous emmenant sur la célèbre route des vins en
compagnie de trois gais lurons, qui tâcheront, ensemble et
individuellement, de surmonter l’ivresse d’un intime désespoir.
Les
réalisateurs, Benoît Delépine et Gustave Kervern, ne cachent pas leur
attachement à cette France, profonde et authentique, ni leur profonde
affection pour un monde agricole qui est en souffrance depuis bien
longtemps. En réunissant un tandem d’acteurs qui fonctionne à merveille
et qui n’ont guère dû être très dépaysés par les décors au sein desquels
ils évoluent, les deux cinéastes saisissent également une belle
occasion pour raconter une véritable histoire d’amour entre un père et
son fils. Depardieu, qui sous les allures bourrues d’un paysan toujours
passionné par son métier et fermement attaché à la culture de sa terre
nourricière, incarne avec une touchante tendresse le rôle de ce père,
pétri de bonté, veuf et poète à ses heures. N’étant pas parvenu à faire
le deuil de son épouse, il se montre totalement désarmé face à
l’attitude d’un fils, en mal d’amour, miné par sa condition de « bouseux
_ » et qui ne rêve que d’abandonner l’exploitation familiale.
On
soulignera également la trop courte apparition de Michel Houellebecq,
qui avait d’ailleurs été pressenti pour endosser le rôle joué par
Vincent Lacoste, au cours d’une scène inénarrable. L’écrivain nous
prouve, une nouvelle fois, son potentiel comique naturel et son sens de
l’autodérision tout comme il l’avait fait dans cet ovni
cinématographique qu’était L’enlèvement de Michel Houellebecq .
Saint-Amour est
à l’image du vin dont s’inspire son titre : un film à l’appellation
d’origine comique, à la robe légère et joyeuse, charpenté par des
acteurs aussi vrais que nature, capables d’insuffler à un scénario très
simple les arômes épicés de l’émotion.
À consommer sans modération.
( Christie Huysmans )