Comédie sentimentale
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Coup de coeurROMANCE & CIGARETTES

John Turturro (USA 2006 - distribution : Paradiso)

James Gandolfini, Susan Sarandon, Kate Winslet, Christopher Walken, Steve Buscemi

115 min.
19 juillet 2006
ROMANCE & CIGARETTES

Il est possible de vivre de peu au cinéma.
De « Chocolat » (Lasse Hallström), d’« Amour et d’Eau Fraîche » (Jean-Pierre Blanc), de « Coquillages & Crustacés » (Ducastel et Martineau).

Les cigarettes, même quand elles n’accompagnent pas le café comme chez Jarmush, sont déjà une façon de prendre position dans une société. Une position marginale, décalée, out of law dans un monde en voie de formalisation du quotidien et de ses gestes les plus infimes.

Position latérale qui est aussi celle du réalisateur dans le cinéma américain, de la plupart de ses interprètes et de ses producteurs les frères Coen, courageux Lucky Luce du 7ème art avec lesquels Turturro a tourné pas moins de 4 longs métrages (« Miller’s Crossing », « The Big Lebowski », « O’Brother Where Art Thou » et « Barton Fink »).

C’est d’ailleurs au cours de ce dernier film que le cinéaste a écrit le scénario de « Romance & Cigarettes » : une histoire banale d’adultère mais traitée avec une générosité et un allant communicatifs.

Le film est moins un film musical, quoique les acteurs y poussent la chansonnette ou s’y livrent à
quelques pas de danse, qu’un film architectoné par la musique et notamment des tubes des années soixante dont les titres sont, à eux seuls, de parfaits exutoires aux déchirements sentimentaux des personnages (« A Man Without Love » d’Engelbert Humperdinck, « It’s a Man’s, Man’s World » de James Brown, « Delilah » de Tom Jones)

Si Turturro a le don de faire coller émotions et chansons, il a aussi celui d’obtenir de ses interprètes - notamment de Kate Winslet auprès de laquelle Madonna, même dans ses clips les plus torrides a l’air d’une janséniste de Port Royal – une tonalité de jeu mêlant l’excès à la décontraction, la sentimentalité des romans photos à la salacité d’un Bukowski.

Et si le film a un petit côté Luigi Comencini dans « Pane, Amore & Fantasia », il n’est pas exempt
d’ancrage social bien loin des dorures des musicals de Mark Sandrich/Fred Astaire et plus proche d’une réalité économique, celle de la classe ouvrière que Turturro connaît bien pour en avoir fait l’axe central de son premier film « Mac ».

Turturro n’est pas un crooner, il ne susurre pas l’amour car il sait que quand celui-ci cogne ça fait mal, il a plutôt le talent d’un maître de chorale qui sait faire swinguer ses troupes entre chagrin et drôlerie et auquel on a envie de chanter, après avoir lu le long et documenté générique de fin, « Ti amo Johnny ». (m.c.a)