Drame intimiste
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RESTLESS

Gus Van sant (USA 2011)

Mia Wasikowska, Jane Adams, Henry Hopper, Ryo Kase, Schuyler Fisk

95 min.
21 septembre 2011
RESTLESS

« Life’s but walking shadow … » - la vie n’est qu’une ombre qui passe (Shakespaere in Macbeth acte V, scène 5)

L’intérêt de Gus Van Sant pour les (beaux) jeunes gens et son questionnement sur la mort sont de notoriété cinéphilique.

Pourquoi dès lors a-t-on l’impression que « Restless » est moins « vansantien » que « Gerry », « Last days », « Elephant », « Paranoid park » … alors qu’il est intimement noué autour de ces deux fondamentaux de l’univers du cinéaste ?

Sans doute parce que le cinéma de Van Sant loué pour son incontestable modernité formelle semble ici étrangement académique. Donnant l’impression d’un cahier des charges à la fois respecté mais aussi déforcé par un manque de ces moments « esthétiques » et subtils par lesquels s’expriment habituellement les émotions, lenteurs et non-dits caractéristiques de son art.

Depuis la mort de ses parents, Enoch s’écroule morceaux par morceaux. Il a besoin, pour se reconnecter à ce réseau d’énergie qui donne envie et goût de vivre, de leçons de courage et de confiance.

Elles lui seront données par une jeune fille qui trouve à son destin une justification au-delà d’un réel plombé par une maladie incurable dont elle sait l’échéance proche.

Même si « Restless » jongle au plus près avec les ficelles constitutives d’un mélo de type hollywoodien, même s’il est, et le cinéaste ne s’en cache pas, une œuvre de commande des Howard père et fille (*), il demeure malgré tout marqué par le style d’un cinéaste qui sait comment faire pour tirer un film des ornières de facilité et de consensualité mélancolico-romantiques dans lesquelles il risquait de s’enliser.

C’est par une inattendue douceur, une pudeur soyeuse et parfois déchirante, une singulière atmosphère faite de raison et de déraison - pour éviter de céder à une détresse suicidaire, le héros s’invente un ami imaginaire (**) - et un jeu de deux jeunes acteurs convaincants (***) que Gus Van Sant réussit à pointer des blessures, des angoisses, des colères et des tristesses.

Pour éviter que celles-ci ne se délitent sous des impressions qui semblent parfois trop éclatées ou confuses, le réalisateur qui connaît la puissance des images et la trace qu’elles laissent dans les mémoires choisit, à la manière des "estampeurs" japonais, de cerner d’un trait de craie ce qui est amené à disparaître :

Deux jeunes corps allongés qui, éphémèrement soudés, acceptent de s’abandonner au sort qui les attend.

Baisser de rideau pour l’un et replongée dans l’existence pour l’autre.

Comme dans « Harold et Maud », comme dans « Garden state », et ce n’est pas André Breton qui le démentira, l’équilibre des relations amoureuses est une affaire de vases communicants. (mca)

(*) Ron et Bryce Dallas
(**) un jeune samouraï. Chez Nicole Roland, lauréate 2011 du prix Première, aussi c’est le visage d’un pilote à peine sorti de l’adolescence et photographié en 1945 qui lui a donné l’idée de son livre « Kosaburo »
(***) Henry Hopper (le fils de Denis) et Mia Wasikowska dont le talent délicat élégant n’est pas sans rappeler celui de l’excellente Carey Mullingan ("An education ", " Never let me go")