Manuela Velasco, Ferran Terraza
Dans un de ses films (« La règle du jeu » ?) Jean Renoir le clamait haut et fort : le drame dans la vie c’est que chacun a ses raisons.
Raisons d’aimer ou pas, par exemple, un genre de films. Qui entraînent à leur tour à s’interroger sur ce qu’on attend du cinéma.
Si on attend de celui-ci du thrill, de la sensation épidermique, du ressenti costaud, « Rec » est pour vous.
Si l’effrayant, l’ensanglanté, le carnivore ne vous procurent aucune satisfaction, appuyez plutôt sur la touche « Stop » de votre enregistreur.
Une jeune journaliste d’une télévision locale, accompagnée de son caméraman, suit une équipe de pompiers pour ce qu’elle croit être une sortie de routine.
Dans un immeuble bourgeois d’où partent les cris d’une vieille dame, elle fera de surprenantes rencontres.
Il n’est pas aisé de discerner, parmi le fatras d’intentions du réalisateur, ce qu’il a voulu privilégier.
L’attirance/répulsion du spectateur - ou plutôt d’un type de spectateur - pour l’épouvante confortable (*) c’est-à-dire celle vécue une main sur l’accoudoir d’un fauteuil de salle de cinéma l’autre dans un sac de pop corns ?
L’hommage à une façon de filmer qui, par le recours à la technique de la camera-subjective (**), hypertrophie le processus de participation du spectateur à l’action en l’installant au cœur même des événements ?
L’envie de donner aux amateurs du genre la dose d’adrénaline qui les fera ronronner de plaisir ?
A condition d’être patients car l’apéritif au gore est long. Vraisemblablement que cette montée lente au Golgotha fait partie, pour les mordus (au sens propre et figuré) de l’horreur, des délices de l’entreprise.
La remise en cause d’une télévision qui amalgame réalisme, sensationnalisme et voyeurisme ?
Quoi qu’il en soit, « Rec » devrait être montré, en Belgique, aux pouvoirs qui refusent de reconnaître aux hommes du feu le statut de « métiers à risques » ….
Le fait que les acteurs soient plus hystériques que talentueux et les situations hyper stéréotypées n’a pas dissuadé les jurys du festival de Gerardmer d’accorder à "Rec" leurs prix spéciaux, du public et de la jeunesse ! (m.c.a)
(*) « Rec » est à mille lieues de la notion de « violence-jouissance » dénoncée par Michael Haneke dans ses « Funny games ». Ici c’est de l’horreur-
(**) L’ancêtre de la technique est « The lady of the lake » de Robert Montgoméry et plus récemment « The Blair Witch project » de Daniel Myrick et Eduardo Sanchez en 1999 et « Cloverfield » de Matt Reeves en 2007.