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RATATOUILLE

Brad Bird (USA 2007 - distributeur

en VO les voix de Peter O’Toole, Lou Romano, Janeane Garofalo

110 min.
1er août 2007
RATATOUILLE

Le cinéma continue à relever de la magie. Il est, dans le domaine de l’animation, l’art premier de la transsubstantiation. Capable de transformer les muridés, qui dans la vie réelle suscitent peur et animosité, en bestioles aimables et réconfortantes.

Si plus rien n’était à prouver avec les souris - Mickey, Jerry et Little Stuart ayant accompli le travail de récupération affective - beaucoup restait à faire pour réhabiliter le rat depuis sa sinistre apparition dans « La belle et le clochard ».

C’est maintenant chose faite grâce à Rémy, un charmant raton qui, le jour venu pourra répondre à la difficile question de la parabole biblique : qu’as-tu fait de ton talent ?

En effet, douée d’un flair hors du commun, notre surmulot (sa couleur grise et sa taille d’environ 25 cm le rangent dans cette sous catégorie des rongeurs) sait comment analyser les saveurs et les apparenter en bouquet original capable de séduire les papilles gustatives les plus blasées.

Satisfaisant au credo de la plupart des dessins animés - on n’est rien seul et la plupart des alliances efficaces résultent de la réunion des contraires -, Rémy, le virtuose rencontre Linguini, un jeune gâte-sauce qu’il guidera, par un stratagème très inspiré de deux mythes grecs (*), sur le chemin de la confiance en soi.

Ce joli film réalisé en 3D se passe dans la plus belle métropole du Monde, Paris/France. Célébrée à la fois pour la vivacité de ses égouts (hommage à Hugo ?), sa réputation de ville-lumières inspiratrice des cinéastes américains (Woody Allen, Vincente Minnelli, Stanley Doonen) et sa gastronomie.

Très réussi sur le plan techno-formel (**), scénaristiquement cohérent, à la fois inventif et gentiment caricatural, réussissant à camper des personnages saisis dans leurs faiblesses - la timidité d’un jeune cuisinier, l’arrogance d’un prétentieux critique gastronomique, l’ambition d’un chef de restaurant - sans abandonner l’espoir de les faire évoluer, par une prise de conscience personnelle, vers une vision plus généreuse de la vie. 

« Ratatouille » est un film qui a, comme on le dit d’un bon vin, du coffre et un bel habit.

Il charmera peut-être moins les enfants que les adultes, qui y liront des piques contre la mal bouffe de l’époque livrée aux conserves et aux surgelés, contre les critiques (de cinéma ?) qui font la pluie et le beau temps dans leur domaine, et contre cette mode qui décode dans les chromosomes des conduites imposées de vie.

Non l’hérédité n’est pas l’unique déterminant. Ce qui l’est c’est de ne pas céder à la résignation d’un destin apparemment tracé. De regarder autour de soi et de voir, qu’avec un autre à ses côtés, les mots « rupture de ban » (pour Rémy) et « essayer » (pour Linguini) retrouvent un sens.

Une saveur, celle d’une ratatouille qui, par sa simplicité, cassera les « ego » - du nom du critique gastronomique le plus puissant sur la place de Paris « Anton Ego » dans le film - et suscitera, comme la Madeleine chez Proust, le rappel que le bonheur, finalement, n’est pas chose compliquée. S’il n’est pas « toujours dans le pré » (***), il peut être dans l’assiette. (m.c.a)

(*) celui d’Athena qui trouve refuge sous le casque de son père Zeus, et celui de la façon de conduire un attelage chez Platon (in « Phèdre » - éd. Les belles lettres)
(**) un exclusif « Pixar côté cuisine » dans « Ciné Live » de juin 2007
(***) d’Etienne Chatiliez