Sam Riley, Garrett Hedlund, Kristen Stewart, Kristen Dunst, Amy Adams, Viggo Mortensen, ...
Road movie en forme d’hommage à la Beat Generation, Sur la Route est une déception creuse qui, de plus, tire en longueur. L’hésitation (celle de Jack Kerouac, l’auteur du livre dont le film est l’adaptation) entre conservatisme et aspirations libertaires engendre un manque de rythme, aggravé par les temps morts et les accélérations de la route. Malgré le soin accordé par Walter Salles (à qui l’on doit Carnets de Voyage , 2003) à se documenter en prenant la même route que Kerouac pour vivre le récit au coeur des terres qui l’ont habité (et dont le résultat fut un documentaire ( In Search of On the Road , 2010)), Sur la Route manque le coche.
L’histoire est celle de Sal Paradise (alter ego de Jack Kerouac), jeune écrivain en recherche de concrétisation, qui, peu après la mort de son père, rencontre Dean Moriarty (alias Neal Cassidy), un jeune ex-taulard au charme incendiaire, marié à l’envoûtante Marylou. Entre eux, c’est une grande amitié qui commence, accompagnée de sexe, d’alcool et de benzédrine. Au cours de périples vers l’ouest, leur route croisera celle d’autres acteurs de la Beat Generation (William Burroughs, Allen Ginsberg) et de paumés en recherche de libération intérieure.
Le film retrace le peu de substance laissé par un roman classé parmi les 100 meilleurs du 20ème siècle : le trajet d’une jeunesse en fuite de toute responsabilité, sans repères ni buts, errant dans une absence de sens totale et ne cherchant même pas à en donner à leur parcours. Pour s’abrutir et se divertir, ils ne voient d’autres recours que l’alcool, le sexe et la drogue. Un écho que l’on retrouve dans les jeunes générations d’aujourd’hui, qui pour remplir ce temps de vie dont elles disposent, s’abreuvent d’images et se noient dans la consommation sur un mode compensatoire dont elles ne voient jamais le bout.
Même si Walter Salles donne plus de présence aux femmes dans son film, et malgré le tempérament volcanique de la jeune Marylou et sa liberté sexuelle, la misogynie de Kerouac semble toujours planer sur le tout. Ces femmes n’ont d’autres choix que de se sauver elles-mêmes en s’éloignant d’hommes égoïstes et destructeurs. Et l’horizon qui leur est proposé n’est jamais que celui de la survie.
Malgré un casting exceptionnel sans fausse note (mention spéciale à Kristen Stewart, Kristen Dunst, Amy Adams et Alice Braga, en clin d’oeil sarcastique à Kerouac), une interprétation de talent, des espaces défrichés qui se prêtent à une photographie unique, il manque un brin d’âme à ce film, comme d’ailleurs à la plupart de ses personnages d’écrivains qui se consument dans l’illusion de leur créativité inspirante.
(Ariane Jauniaux)