Comédie sentimentale
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ODETTE TOULEMONDE

Eric-Emmanuel Schmitt (France 2006)

Catherine Frot, Albert Dupontel, Jacques Weber

95 min.
7 février 2007
ODETTE TOULEMONDE

Eric-Emmanuel Schmitt est un homme de lettres auquel l’écrit-vint vite, aisément, donnant à ses lecteurs une impression de confort et de bien-être.

On ne le lit pas pour parfaire sa culture ou y trouver des éléments de réflexion métaphysique.
On le lit pour le plaisir.

Comme Odette Toulemonde, cette vendeuse de grand magasin, dont la route va croiser celle Balthazar Balsan, homme de lettres en déprime depuis qu’il a été éreinté par un critique bilieux.

Ce qui est intéressant dans cette rencontre, au-delà des oppositions entre deux mondes et deux caractères qui, il est vrai, pèsent et pèchent par un excès de poncifs, c’est la confrontation entre deux philosophies de vie. Celle d’Odette est axée autour du plaisir. Des plaisirs simples comme monter des œufs en neige, chanter du Joséphine Baker, retrouver l’état de grâce pascalien - la lévitation – à la lecture d’un livre qui donne du bonheur.

Celle de Balthazar, moins immédiate et plus intellectualisée, est visée à la notion de désir. Désir, qui, étant d’être pris pour ce qu’on n’est pas, engendre frustration et dépression.

Evidemment le côte un peu neuneu proche des leçons de vie à la Jacques Salomé (**) peut irriter ou lasser, mais au-delà de l’agacement il existe un quelque chose qui touche parce qu’il comble un manque de l’époque moderne : l’espoir.

L’espoir de pouvoir à tout moment se réapproprier pour lui une vie qui se délite dans l’’inauthentique et le futile et pour elle une existence dont l’âpreté quotidienne l’a obligée à mettre de côté charme et féminité.

Si la mise en scène réserve, à côté de faiblesses de rythme et d’imagination, quelques bonnes idées dont la vision d’un Charleroi loin de son cliché « petit Chicago », le duo Odette/Baltazar possède une indéniable efficacité

Catherine Frot est, comme toujours, formidable. Elle arrive à donner épaisseur à la moindre platitude. Cette actrice est une poétesse. Comme son homologue masculin Bourvil, elle réussit, sans être ridicule à incarner la naïveté et la bonté. C’est une actrice élégante et prosaïque dont on sent parfois germer, retenus mais tenaces, des grains de folie et de douleur secrète qui pimentent d’inattendu un jeu a priori classique.

Dupontel, en double (aminci) du cinéaste, lorsqu’il se sent critiqué et incompris en tant qu’auteur à succès, apporte crédibilité à la question quasi épistémologique qui sous-tend le film : pourquoi ce mépris vis-à-vis d’une une littérature facile au point de l’imaginer réservée aux coiffeuses et aux caissières.

N’est-ce pas là faire injure aux caissières, aux vendeuses, et à la littérature ? (m.c.a)

(*) Quoique l’histoire ait été écrite d’emblée pour le cinéma, elle est reprise, en qualité de nouvelle, dans un recueil de textes courts paru chez Albin Michel
(**) « Le bonheur s’est de s’accepter soi-même », « le jour finit toujours par se lever » etc….