Drame social
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MOUNTAINS MAY DEPART (AU-DELÀ DES MONTAGNES)

Jia Zhang-Ke

Tao Zhao, Yi Zhang, Jing Dong Liang

131 min.
23 décembre 2015
MOUNTAINS MAY DEPART (AU-DELÀ DES MONTAGNES)

C’est sur la chanson « Go West » des Pet Shop Boys que s’ouvre, à l’aube de l’an 2000, le film du réalisateur chinois Jia Zhang-Ke et qu’il se referme également 25 ans plus tard. Incomparablement moins violent que son film précédent, A Touch of Sin, lequel lui avait valu de remporter le Prix du Meilleur Scénario en 2013, Mountains May Depart n’en dresse pas moins le portrait aigre-doux d’une Chine mutante écartelée entre sa cruelle pauvreté et le bing-bling de ses nouveaux riches, toujours tiraillée entre l’attachement à ses traditions et le chant des sirènes de l’Occident.

Partant d’un dilemme amoureux, Mountains May Depart confronte la Chine et ses concitoyens à ses choix économiques et aux enjeux culturels et moraux qu’ils impliquent. Courtisée par deux amis d’enfance, Zang et Lianzi, Tao est placée face à deux prétendants totalement différents : l’un est propriétaire d’une station-service très prospère, l’autre est ouvrier dans une mine de charbon. Le cœur entre les deux hommes, Tao va devoir prendre une décision qui scellera son destin et celui de son fils.

Tandis que les uns se tuent littéralement à la tâche dans les mines, les autres pestent d’avoir les moyens financiers de s’offrir une artillerie de guerre dernier cri mais de ne pas être libres de pouvoir l’utiliser comme bon leur semble, dénonce avec aigreur Jia Zhang-Ke. Si l’accès aux soins représente une fortune hors de portée pour les uns, jouer aux cow-boys n’est que peanuts pour les mercenaires de la finance, poursuit-il. Le constat dressé par le réalisateur chinois est souvent agrémenté d’un humour acide mais la tendresse dont il dote son héroïne rééquilibre la balance du désastre humain.

Même si l’approche de départ peut sembler caricaturale en regard de l’opposition flagrante qui sépare les deux protagonistes masculins, le réalisateur ne s’enfonce nullement dans une vision dichotomique des choses. En maintenant son personnage féminin au centre du tumulte, il fait d’elle un pivot qui tente, tant bien que mal, de réaliser la synthèse entre deux extrêmes. L’exercice de funambule auquel se livre Tao n’est ni sans risques ni sans dangers mais viser la perfection serait illusoire. Chaque médaille ayant son revers, mieux vaut choisir le moins mauvais côté des deux si l’on veut être sûr de ne pas se tromper (se tromper étant à prendre dans tous les sens du terme.

( Christie Huysmans )

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