Miou-Miou, Valeria Bruni-Tedeschi, Anne Consigny, Lambert Wilson, Pierre Arditi
De son manoir de Torquay, au siècle dernier, la « reine du crime », Agatha Christie, proposait à ses lecteurs enthousiastes des histoires criminelles, mondaines et souvent acerbes situées dans de jolis coins de la campagne anglaise.
Il y a 3 ans, Pascal Thomas redécouvre le charme de ces récits faits de suspense, de snobisme, d’humour et d’évanescentes critiques sociales dans sa première adaptation pour le cinéma d’un roman de cette auteure qui se félicitait d’avoir épousé un archéologue parce que « plus je vieillis plus il me trouve belle ».
C’était « Mon petit doigt m’a dit » suivi en 2007 d’une « Heure zéro », deux petits précis de mécanique policière actionnée par des comédiens impeccables.
C’est maintenant au tour d’un autre Pascal (Bonitzer), à la fois réalisateur et scénariste, du cinéma français de se pencher sur le mystère des « whodunit » christiens
Il le fera en félon distingué puisque, tout en s’inspirant du « The hollow » (*) écrit en 1946, il donne à son film le titre d’une autre intrigue, celle tout aussi retorse, du « Grand alibi » d’Alfred Hitchcock (titre original : "Stage fright" avec Marlene Dietrich et Jane Wyman)
Pierre Collier est mort. Assassiné chez le sénateur Henri Pages au cours d’un week-end de détente (!). Sa femme est la coupable désignée puisqu’elle a été trouvée, à côté du corps de la victime, un revolver à la main. Mais très vite les choses se compliquent.
En raison de la personnalité du défunt, à la fois révélateur des inconscients - il est psychiatre – et bourreau des cœurs.
Beaucoup de choses sont luxueuses dans « Le grand alibi » - les modes de vie, les comptes en banque, les maisons - et contrastent pesamment avec les médiocrités, peurs et mesquineries de ceux qui portent la trame policière bien au-delà d’un simple cluedo.
Manigances et faux semblants des personnages - dans ce registre le bons sens teinté de malveillance d’une Miou-Miou donne des envies de ronronner d’aise et de malice - n’échappent pas à une caméra détectrice des lézardes d’une bourgeoisie en bout de crédibilité et au regard plus barbare qu’il n’y paraît d’un cinéaste qui, sous sa patte de velours, cache une griffe qui sait être acérée.
Qu’est-ce qui manque à cet alibi pour être grand ? Un resserrement de rythme ? Une jubilation qui enlève aux dialogues leur côté théâtral ? Une souplesse dans le jeu de certains pions - Caterina Murino, Jacques Demy, Anne Consigny ?
En tout cas une fin sans un granguignolesque - inspiré du « Judex » de Franju - qui ôte à l’entreprise une partie de sa cynique morale. (m.c.a)
(*) En français, « Le vallon » paru en livre de poche et dont une version télévisée existe dans la série des Hercule Poirot avec David Suchet dans le rôle du détective aux « little grey cells ».