Adaptation d’un livre
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LA VIE D’UNE AUTRE

Sylvie Testud (France 2011)

Juliette Binoche, Aure Atika, Mathieu Kassovitz,François Berléand

22 février 2012
LA VIE D'UNE AUTRE

S’il n’est pas étonnant que la comédienne et écrivaine Sylvie Testud passe derrière la caméra, sa capacité d’expression est on le sait polymorphe, il est plus étrange pour sa première réalisation de la voir s’intéresser à un livre de Frédérique Deghelt.

A la fois parce que celle-ci est une auteure consensuelle, très fleur bleue tendance girlie alors que dans ses rôles la réalisatrice a toujours séduit par une marginalité faite d’audace et de malicieuse intelligence. 

C’est sans doute dans ce grand écart qui est demandé au spectateur que se niche sa déception.

Accentuée par le fait que la cinéaste, dans ses choix narratifs, a décidé de déprivilégier les aspérités fantastico-psychiques du roman (pourquoi décide t-on même inconsciemment d’effacer une partie de sa vie ?) pour se contenter d’en proposer une adaptation pour midinettes - a chickmovie ?

Il y a quinze ans, Marie a rencontré l’homme de sa vie. Années dont elle n’a plus la mémoire lorsqu’elle se réveille à 40 ans, étonnée de constater qu’elle a un fils et que son mariage est sur le point de voler en éclats.

Que s’est-il passé ?

Pas grand-chose semble-t-il sauf que dans ce pas grand-chose se niche la pesanteur des choix égoïstes, des embourgeoisements, des diminutions de libido qui transforment peu à peu une jeune femme passionnée en une quadra accro au boulot et au standing - question cadre de vie, la petite entreprise Testud ne connaît pas la crise ...

Rien de nouveau dans ces constatations que Charles Aznavour a chantées (*) et auxquelles Sophie Marceau a donné forme dans « L’âge de raison » de Yann Samuell - que sont devenus, à l’âge adulte, les rêves d’une enfant ?

Est-ce parce Sylvie Testud favorise l’histoire d’un couple en crise au détriment d’un réel questionnement sur la mémoire (ce qu’elle garde et ce qu’elle rejette).Sur le temps - cette efficace pierre ponce des désirs et dispositions pour un bonheur simple - que le spectateur ressent une désagréable impression de déjà-vu, de superficialité et d’artificialité ?

Impression que n’arrivent pas à gommer une mise en scène sans surprise et une interprétation plutôt bancale - Juliette Binoche, qui use et abuse de ses "effets lumineux", est à la traîne de ses émotions et Mathieu Kassovitz décidé à ne pas exprimer les siennes.

Marie a 4 jours pour reconquérir l’homme de sa vie.

SylvieTestud en a bien plus pour nous convaincre qu’elle a derrière la caméra autant de subtilité et d’intensité que devant.

Le prouvera avec sa mise en images du premier roman de Titiou Lecoq, "Les morues" ( paru Au Diable Vauvert) dont elle vient d’acquérir les droits ?. (mca)

(*) dans le poignant "Tu te laisses aller"