Bérénice Bejo, Martina Gusman, Joaquín Furriel, Édgar Ramírez, Graciela Borges…
« Hey à quoi ça sert
À quoi ça sert de venir te voir
À quoi ça sert
De quoi j’ai l’air
Quand je frappe à ta porte ce soir
Qu’est-ce que j’espère,
Qu’est-ce que j’espère ? »
Ce sont là les paroles de la belle chanson de Vanessa Paradis, sur lesquelles Pablo Trapero ouvre son film en nous divulguant de magnifiques paysages avant de pénétrer le domaine familial qui va nous intéresser. Un ranch, aux murs rouges, sorte de vestige de l’époque coloniale, La Quietud (que l’on pourrait traduire en français par la sérénité), nom relativement ironique… Car la sérénité sera plutôt absente de ce drame à première vue familial.
Une crise cardiaque ayant plongé son père dans le coma, Eugenia (Bérénice Bejo) revient dans le domaine familial de Buenos Aires après de longues années d’absence, pour retrouver sa mère, Esmeralda (Graciela Borges) et sa sœur, Mia (Martina Gusman). D’emblée, la ressemblance entre les deux sœurs s’avère déroutante, rendant difficile la distinction entre les deux (si ce n’est le vernis à ongles rouge que Mia porte tout au long du film). La confusion sera même totale lors des ébats entre les deux sœurs se rappelant l’époque où elles étaient jeunes et se donnaient du plaisir mutuellement en fantasmant sur le plombier du domaine.
Très vite, nous comprenons que nous sommes plongés au cœur d’une famille dysfonctionnelle (mais quelle famille ne l’est pas, finalement ?), où règnent jalousie, haine et perversion. Mais ce qui rend ce drame familial si intéressant, c’est que, finalement, il n’est pas si intimiste que cela, mais qu’il nous laisse entrevoir, en filigrane, des éléments historiques d’un pays qui a souffert, les non-dits et les répercussions et traumatismes que cette histoire (macro) peut avoir sur le microcosme.
Force est de constater qu’avec La Quietud, Pablo Trabero signe un film dérangeant que certains qualifieront d’amoral (surtout au vu de la fin du film). Néanmoins, La Quietud est un film à l’esthétique extrêmement soignée, mettant en scène deux superbes actrices dont l’érotisme et la beauté transcendent l’écran. Les cadrages remarquables, les plans-séquences, la tension croissante et cette trame historique qui se fond sur la trame personnelle font de ce film une petite perle qui vaut certainement le détour.
(Astrid De Munter)