Déception
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L’HISTOIRE DE RICHARD O.

Damien Odoul (France 2007 - distributeur : Les Films de l'Elysée)

Mathieu Almaric

75 min.
17 octobre 2007
L'HISTOIRE DE RICHARD O.

Sortait sur les écrans bruxellois, en début de ce printemps, « En la cama » un huis clos sensuel, filmé avec cœur et authenticité par l’agile caméra DV d’un jeune réalisateur chilien de 28 ans Matias Bize.

De cette rencontre passagère entre un homme et une femme dans une chambre d’hôtel se dégageait quelque chose d’étrange et de troublant. Une contraction temporelle qui donnait l’impression de vivre en une journée les zéniths et les nadirs du rapport amoureux.

Rien de tel avec cette « Histoire de… » (*) qui, à travers les multiples expériences sexuelles d’un homme mouvementées par le désir altruiste (?) de comprendre le mystère féminin, donne l’impression d’un étirement désobligeant du temps. Preuve s’il en fallait de la subjectivité de son écoulement qui semble interminable quand on s’ennuie.

Paraphraser le début de « Brise marine » de Stéphane Mallarmé « La chair est triste, » en la complétant d’une suite moins littéraire et plus cinématographique… « ! hélas et j’ai vu tout le film », ne console pas de la sinistrose de cette compulsion qui pousse Richard O. à emmener au lit (au plancher, dans l’arrière salle d’un restaurant... peu importe le lieu pourvu qu’il y ait l’ivresse) les femmes qu’il rencontre. Aux conditions qu’elles soient consentantes (ouf…) pas trop moches (dommage….cette pruderie esthétique plombe la quête d’une ringardise très petit-bourgeois) et hyperlaxes (qualité indispensable étant donné les cabrioles qui les attendent)

Film hormonal, « L’histoire… » n’a rien du regard porté par Richard Brooks, dans « Looking for Mr Goodbar » sur une Diane Keaton poussée, pour échapper à la solitude, à écumer les bars à la recherche de partenaires sexuels.

Il n’a rien non plus du sens de la fête et de la réjouissance du « Shortbus » de John Cameron Mitchell .

C’est un film triste, où le mâle, loin d’être dominant, est une marionnette appendue à un appendice (qui n’a rien de nasal) et machiné par des partenaires avec lesquelles les étreintes oscillent entre la gestuelle sportive, l’esthétisme artificieux, et le porno soft (on privilégie les plans moyens aux plans rapprochés).

En relation contrapuntique à ces rencontres (13 au total, nombre fétiche des films gore ou d’horreur), l’étrange relation qui unit Richard à son ami-assistant, sorte de gourou placide, avec lequel il symbolise le couple durable auquel il évite soigneusement de donner forme lors de ses rencontres erratiques.

Mathieu Almaric est égal à lui-même. Très impliqué à jouer de et avec son corps, comme il l’était de sa sensibilité dans « Michou d’Auber » de Thomas Gilou ou de son approche décalée de la réalité dans « Rois et reine » d’Arnaud Desplechin.

Après le « Snuff movie », voici le « Sex live movie » - celui où, au fil des heures de tournage, la relation sexuelle entre les acteurs cesse d’être virtuelle.

Une évolution ou une involution ? En tout cas une occasion de recevoir le plus prestigieux des prix attribués par le Festival de Venise, comme ce fut le cas pour Ang Lee qui a reçu cette année, pour « Lust, caution » le Lion d’Or. (m.c.a)

(*) « O » comme Odoul, le réalisateur ou « O » comme un hommage à l’histoire imaginée par Pauline Réage (en réalité Dominique Aury) pour son amant Jean Paulhan ?