Ellen page, Michel Cera, Jennifer Garner, Jason Bateman
Alors qu’il est très tendance d’ironiser sur les problèmes de la société occidentale moderne ou d’y apporter des réponses violentes, invraisemblables, abrutissantes, voilà une réflexion qui, sous sa convivialité bon enfant, cache une inattendue audace.
Oui il y a moyen d’affronter un événement inattendu de la vie sans se détruire et détruire les autres.
C’est à travers l’amour et le respect que Juno, une jeune fille de 16 va vivre une grossesse non désirée mais néanmoins assumée. Assumée d’une façon originale et altruiste puisque l’enfant qu’elle porte elle envisage, ne souhaitant ni en avorter ni le garder, de le confier à une famille en demande d’adoption.
Amour des siens d’abord et notamment d’un père et d‘une belle-mère capables d’écouter et d’accompagner une adolescente dont les attitudes « cool » ne cherchent pas à cacher les désarrois mais à les border d’une frontière capable de maintenir l’angoisse à température vivable.
Respect d’elle-même ensuite. Les vannes qu’elle se lance sur ses transformations corporelles et son immaturité affective ne sont que des tentatives attachantes et désarmantes de faire face, sans céder à une introspection culpabilisante, à une situation moins évidente que celle imaginée.
Respect d’un engagement qui semblait facile à tenir tant que l’enfant-foetus était appelé « la chose » mais qui au fil des saisons - Jason Reitman a la bonne idée de décliner le récit au gré des humeurs atmosphériques d’un automne nonchalant, d’un hiver rigoureux et d’un printemps prometteur - se leste du poids de ce lien indicible entre celle qui porte et celui qui est porté.
Avec « Juno » on est à mille coudées de la leçon de morale dévidée sur le ton de l’humour potache du « Knocked up » de Judd Apatow, de la fébrilité hystérique du « Nine months » de Chris Columbus, de la problématique d’une Irlande catholique dans "The snapper" de Stephen Frears.
On est dans une histoire (*) touchante aux accents doux - pas de super héros, de péripéties clownesques - et confiants dans une jeunesse capable de ne pas stagner dans une amertume stérile ou un infantilisme régressif.
A Charlie, le jeune amoureux de Juno et à celle-ci on a envie de dire "Thank you for being (**)" et de leur souhaiter "Bonne chance. Soyez heureux."
Un Charlie auquel Michael Cera apporte toute la grâce maladroite et sincère du jeune amant.
Une Juno à laquelle Ellen Page confère une exquise aura faite d’impulsivité et de bravache tendresse bien éloignée de sa composition âcre et ambigüe dans « Hard candy » de David Slade.
John Malkovitch, homme de cinéma exigeant et peu porté sur les « bonbecks sucrés » destinés à des ados abrutis, est un des producteurs de ce film.
Il a compris que Juno n’est pas qu’un film sur un accouchement. Mais sur la capacité d’une génération - celle de « Blair witch project », du punk revival - à naître à la responsabilité. (m.c.a)
(*) Ecrite par une jeune scénariste dont le patronyme "Diablo Cody" sent bon le piquant du "Crazy Horse" - rien d’étonnant à cela quand on sait qu’elle a été "show woman", pendant quatre ans, dans des boîtes de strip-tease.
(**) Pour paraphraser le premier film de Jason Reitman "Thank you for smoking".