Suzanne Sarandon, Charlize Theron, Tommy Lee Jones
Hollywood’s wars. Elles pourraient, à elles seules, former un sous-genre de la catégorie à laquelle Patrick Brion, aux éditions de la Martinière, a consacré une formidable monographie : le cinéma de guerre.
Qui pourrait contester après « The constant Gardener », « Lord of war » « Syriana » (*) les formidables élan et allant avec lesquels les scénaristes et réalisateurs américains veulent donner à leurs œuvres une conscience ?
Une conscience politique et citoyenne.
Souvent subversives, elles sont le reflet d’un engagement contre. Ces derniers temps, essentiellement contre la guerre En Irak. Renouant ainsi avec la décennie 1970 au cours de laquelle le conflit pointé et critiqué est celui du Vietnam « Apocalypse now », « Coming home », « The deer hunter » (**).
En temps de guerre, il n’y a pas que les pays qui sont livrés au chaos et à la souffrance. Les hommes et les femmes qui sont sur le terrain et ceux qui les attendent sont la proie des mêmes ravages.
Dans « In the valley… » Hank, un ancien sergent de la police militaire est à la recherche de son fils mystérieusement disparu après son retour de Bagdad. Enquêtant pour savoir ce qu’il est devenu, il va peu à peu découvrir une réalité bien éloignée de la « vérité » officielle.
L’intelligence de ce film amer est d’être introspective. Plutôt que de nous montrer ce dont ne se privent pas les fictions guerrières, des horreurs en enfilade (Rambo IV), il propose d’éclairer un désastre à travers le corps, le cœur et le regard d’un père qui se fissure, se fige et s’éteint lorsqu’il se rend compte que son fils, comme son pays, a perdu ses valeurs et moralité.
La faiblesse de ce film est d’être amnésique. Comment peut-on quand on est, comme Hank, un vétéran du Vietnam être à ce point surpris par ce qu’il découvre ?
A-t-il réellement oublié les crimes et tortures de SA guerre (il est inimaginable qu’il ait été le seul à la faire en « gants blancs ») ? Ou est-il plus insupportable d’accepter que son enfant ait vu et participé aux mêmes traitements dégradants ?
Parce que ce serait la preuve que l’Histoire ne retient rien de son passé et que confrontée aux stimuli des combats, la férocité humaine ne reste jamais longtemps embusquée
Paul Haggis sait mener un récit. Il a été le scénariste de Clint Eastwood pour « Flags of our fathers »et « Letters from Iwo Jima ».
Il sait choisir ses acteurs : Tommy Lee Jones et Susan Sarandon apportent à leur rôle le poids de ce qu’ils représentent pour le 7ème art : le sens de l’engagement personnel et sociétal.
Il sait donner un rythme à son récit en alternant des moments de retraits, d’actions et de suspenses.
Il sait couler de densité le laconisme qui s’installe entre des parents que l’épreuve ne soudera pas.
Lui reste à maîtriser une tendance à la redondance. Celle d’intentions qui à force d’être aussi manifestement bonnes en viennent à peser des tonnes. Celle de symboles, comme celui d’un drapeau manipulé avec la dextérité (en haut, en bas, inversé….) d’une majorette pour son bâton, qui fait sourire ou soupirer par l’évidence de sa lisibilité.
Dans la vallée d’Elah, le géant Goliath était défait par le frêle David. (***)
Avec « In the valley of Elah » on sait bien qu’un film ne stoppera pas la guerre. On peut juste espérer qu’il nourrisse chez le spectateur, par les questions qu’il soulève, une salutaire réflexion personnelle.
« In the valley … » est inspiré d’un fait divers qui, par la grâce du cinéma, devient un fait (presqu’) universel. (m.c.a)
(*) Respectivement de Fernando Meirelles, d’Andrew Nicol et de Stephen Gaghan
(**) Dans l’ordre de F.F. Coppola, Hal Hashby, Michael Cimino
(***) Les films de guerre aiment les titres bibliques : « Jacob’s ladder » d’Adrian Lyne