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HORS-LA-LOI

Rachid Bouchareb (France 2010)

Roschdy Zem, Sami Bouajila, Jamel Debbouze

131 min.
29 septembre 2010
HORS-LA-LOI

Bouchareb dans la cour des malentendus. Une fois de plus.

Est-elle du coche ou de sabotage, la mouche qui a piqué les organisateurs du festival de Cannes pour qu’ils entourent la projection de « Hors la loi » d’un arsenal de protection - hélicoptères inclus ! - digne d’une sortie de la Queen Elizabeth à Belfast un jour de Saint Patrick ?

Il n’a fallu que 2 heures, la durée du film, pour que se dégonfle la baudruche. Immodérée publicité parano ayant présenté le nouveau Bouchareb comme un film polémique, voire anti français parce qu’il aborde un sujet demeuré ultra sensible, malgré le demi siècle qui nous sépare de la guerre d’Algérie, dans le conscient et l’inconscient collectif français.

Alors qu’ « Hors-la-loi » n’est pas un film d’historien. Son point de vue n’est pas historique - il se contente d’inscrire l’histoire d’une fratrie dans un moment de l’Histoire qui se trouve être marqué par la guerre d’Algérie- ni politique. Il procéde juste d’un genre cinématographique : l’action dramatique.

3 frères tantôt unis, tantôt désunis. Messaoud engagé en Indochine, Said qui joue au caïd dans un bar-bordel et Abdelkader activiste au sein du FNL, vivent à Nanterre avec leur mère.

Avant d’être expulsés d’Algérie, ils ont assisté en 1945, le jour même de la Libération, à Sétif au massacre par les Français des Indépendantistes. En 1961 ils assisteront à celui du 17 octobre 1961 - voilà les repères historiques qui ont donné à penser que la grenouille se voulait plus grosse que le bœuf.

Comme chez Arcady (*), avec lequel Bouchared semble partager la même vision d’un monde englué dans des clichés aussi usés que ringards, la narration est sans surprise, la forme sans style et le rythme sans tension - à l’exception de deux fusillades rendues avec un sens de la copie ("One upon a time in America" de Sergio Leone) exaspéremment empruntée.

Boursouflé, décousu, manquant de souffle, porté par des acteurs qui cachetonnent et assomment - une prime d’insupportabilité à Jamel Debouzze - trop long, mal mis en scène, grandiloquent, caricatural, poussif, plus proche d’un chromo que d’une fresque, « Hors-la-loi » ennuie. Ou/et consterne.

Et remet sine die tout envie de rouvrir un débat sur une des pages les plus sombres de la France contemporaine.

Pages auxquelles le beau et mystérieux film de Michael Hanneke "Caché" faisait douloureusement et révérencieusement écho. (mca)

(*) Arcady est aux Pieds Noirs ce que Bouchareb est pour les Maghrébins : une sorte de moderne et romanesque Villardhouin qui confondrait humanisme et naïveté.