Naomi Watts, Sean Penn, Ty Burrell, Sam Shepard
« Fair game » pour un « Fair movie » c’est-à-dire un film tiède qui n’est ni un documentaire ni le reflet d’une prise de position affirmée à la façon des films politiques des années 1970 ["The Président ‘s men" d’Alan J. Pakula, "The conversation" de Francis F. Coppola ou "The three days of the condor" de Sidney Pollack(*)].
Juste un de ces films qui fictionnalise une histoire vraie et dont on se demande si la somme d’énergie et de dollars qu’il a nécessité en valait la peine.
Qu’en restera-t-il dans la mémoire du spectateur une fois sorti de la salle de projection ?
Rien qu’il ne connaisse déjà depuis longtemps : oui la guerre d’Irak a été justifiée par un mensonge - Bagdad aurait tenté d’acheter de l’uranium au Niger.
Rien qui l’aura titillé au point de lui donner envie de prolonger la séance par la réflexion ou la curiosité d’en savoir plus sur l’affaire Valérie Plame - déclinée sans « Flame » - du nom de cet agent secret dont l’identité va être jetée en pâture aux médias pour discréditer son époux, un des premiers à avoir mis en doute les raisons utilisées par l’administration Bush pour justifier « sa » guerre.
A mi-chemin entre l’enquête privée qui se veut proche du thriller, la romance-dramatisée-mais- soucieuse-de-happy-end et le constat très « Paris-Match » que la vie d’espion est essentiellement ponctuée par la solitude et l’angoisse, « Fair game » manque de rythme et de tension.
Echouant à insuffler au récit une efficacité que même les présences de Naomi Watts et Sean Penn peinent à ragaillardir.
Et pourtant pouvait-on rêver meilleur choix que celui de cet acteur connu pour ses prises de position radicales contre l’esprit boutefeu de l’administration Bush ?
Proche d’un « devoir scolaire » sans grand envergure mais consciencieusement respectueux des règles tacites du formatage propre aux divertissements visuels du samedi soir, ce n’est pas de fadeur que « Fair game » souffre le plus c’est d’un manque de parti pris qui, le désempêtrant d’une ennuyeuse mollesse, lui aurait donné substance et force.
Doug Liman a fait le choix de privilégier la relation d’un couple malmenée par des circonstances imprévues au discours engagé.
Donnant même parfois l’impression que la guerre n’est condamnable que parce qu’elle met à mal le ronron d’une famille américaine jusque-là modèle plutôt que parce qu’elle sera l’occasion de tuer des milliers d’individus.
Et l’on se prend à imaginer le traitement que des cinéastes de la trempe d’une Kathryn Bigelow (« The hurt locker ») ou de l’intelligence d’un Bertrand Tavernier (« La guerre sans nom ») auraient réservé à cette histoire qu’ils n’auraient pas manqué d’affûter avec ce sens aigu de l’engagement qui rend leurs réalisations formidablement personnelles. Et par nombre de leurs aspects indispensables. (mca)
(*) En France c’était la grande époque des Yves Boisset et Costa-Gavras.