Pour un samedi soir
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CRIMSON PEAK

Guillermo Del Toro

Mia Wasikowska, Tom Hiddleston, Jessica Chastain, Charlie Hunna

119 min.
21 octobre 2015
CRIMSON PEAK

« Le fantôme n’est qu’une métaphore »

Amusant car c’est un vrai spectre qui met en garde Edith Cushing ( Mia Wasikowska) contre les dangers de Crimson Peak. Des années plus tard, loin d’avoir oublié, Edith nourrit une passion plutôt malsaine pour les fantômes, qu’elle partage avec Thomas Sharpe (Tom Hiddleston), entrepreneur désargenté qu’elle va épouser et rejoindre dans sa belle maison située tout en haut d’un mont de terre d’argile pourpre que les villageois surnomment, coïncidence, Crimson Peak. 

Qu’est-ce que les fantômes ont à faire là-dedans ? Pas grand-chose. Le monde hispanique depuis le début des années 2000 a donné une grande importance à la figure du spectre, entité portant en elle toute la violence, mais aussi la sagesse, de l’Histoire. Guillermo Del Toro, réalisateur du film, avait lui-même dans El Espinazo Del Diablo*  théorisé ce rôle essentiel de la métaphore spectrale comme représentation de la mémoire collective. Son retour au fantôme était donc porteur de beaucoup de promesses, non tenues. 

Ici les fantômes tous plus effrayants les uns que les autres ne sont qu’un prétexte d’horreur, une décoration lugubre de plus de la triste Crimson Peak, qui s’efface face à l’histoire. Et l’histoire vaut-elle le détour ? Non.
Qualifiée de « romance gothique », l’intrigue est plutôt un thriller (un peu) gore illustrant l’Amour, avec une grande hache.  

Le gothique est bien présent cependant, le manoir de Crimson Peak, construit de toutes pièces par Guillermo Del Toro, est de loin le meilleur des acteurs, un personnage vibrant et respirant qui vaut à lui seul le détour. 

Dans son ensemble, Crimson Peak se veut un film métaphore de la violence intemporelle de l’amour. Si les figures de style nécessaires à ce message sont bien mises en place, un scénario facile les écrase rapidement pour laisser place à un divertissement superficiel.

Au final donc, beaucoup de promesses, beaucoup de déceptions. Les amateurs d’horreur pourraient y trouver leur compte, les fans de Guillermo Del Toro apprécier les références à ses œuvres précédentes, mais force est de constater que la subtilité scénaristique et la beauté poétique habituelle de Del Toro ne sont plus que des spectres d’eux-mêmes.

Aurélie Waeterinckx

* El Espinazo Del Diablo (Guillermo Del Toro, 2001) est un conte métaphorique mettant en scène un orphelinat, métaphore de la dictature franquiste, hanté par un jeune fantôme représentant ouvertement la violence réprimée de la guerre.