Juste pour passer le temps
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COPYING BEETHOVEN

Agniezka Holland (USA/Allemagne 2006 - distributeur : BFD)

Ed Harris, Diane Kruger

103 min.
15 août 2007
COPYING BEETHOVEN

« Copying… » est à Beethoven ce que Richard Clayderman est à la lettre à Elise. Une massue émotionnelle.

Mais là n’est pas l’important parce que cette opinion n’est que le reflet d’une subjectivité qui peut, à l’instant même où elle est énoncée, être contredite par une autre subjectivité. Plus flatteuse, neutre ou bienveillante.

L’important est de se demander ce qu’apporte au cinéma, à Beethoven et au spectateur la reconstitution d’une réalité qui opte pour le parti pris de contaminer, par la fantaisie fictionnelle, le portrait d’un personnage historique ?

Avril 1824, avant la première de la neuvième symphonie. Beethoven a besoin d’aide. Il demande au conservatoire de Vienne de lui trouver le meilleur étudiant en composition. Ce sera une étudiante. Anne Holtz. Liberté scénaristique par rapport à une vérité historique moins riche en potentiel fantasmatique. Liberté (?) obligée par rapport à une vérité économique qui veut qu’un biopic strictement documenté fasse moins d’entrées qu’une fiction même médiocre.

Ce n’est pas l’idée de la collaboration qui va s’établir entre le musicien et sa copiste qui pose problème. On peut même parfaitement la comprendre et même la trouver indispensable en raison de la surdité qui isolait le maestro du monde.

Ce qui dérange c’est l’emphase sentimentale (*) et professionnelle - laissant croire qu’Anne aurait aidé le compositeur dans la création de ses derniers quatuors… - donnée à cette relation et le cabotinage des deux interprètes pour leur donner consistance.

Ed Harris, il est vrai, est un inattendu Beethoven - remplaçant Anthony Hopkins pressenti pour le rôle - mais sa prestation excessive donne à penser que cet acteur aux capacités étendues (**), n’étant pas convaincu par son personnage, a dû trouver refuge dans la caricature et la lourdeur.
Diane Krüger a la grâce et la beauté. Elle est comme une trille ou un grupetto, ces ornements musicaux destinés à enjoliver les notes principales d’une mélodie.

Le cinéma a toujours fantasmé sur un Beethoven amoureux. Dans « Un grand amour de Beethoven » d’Abel Gance et « Immortal beloved » de Bernard Rose, Harry Baur et Gary Oldman étaient, déjà, obsédés par une bien-aimée. 

Tout comme il a souvent utilisé, avec plus ou moins d’ à propos, les créations beethoviennes comme expressif écrin sonore. Dans l’Abel Gance, c’était la Sonate au clair de lune, dans « Goshu le violoncelliste » de Isao Takahata, la sixième symphonie, dans « A clockwork orange » de Stanley Kubrick, les 2ème et 4ème mouvements de la 9ème arrangés et interprétés par Walter Carlos. (***) 

« Copying… » - et c’est peut-être sa seule légitimité - propose un joli moment d’intensité musicale dans sa représentation de la première performance de l’Ode à la Joie, arrivant à susciter un émoi dû à la mystérieuse alchimie de ces notes qui propulsent, même les athées, vers le Paradis. Ou plus prosaïquement vers des sentiments de paix - ce qui lui a valu d’être choisie comme hymne officiel de l’Union Européenne.

Laissons la conclusion à Peter Ustinov qui dans sa pièce de théâtre « Beethoven’s tenth » se demandait, ce que Beethoven, s’il revenait parmi nous, penserait de notre époque.

Plus modestement, nous lui demanderions ce qu’il penserait du film. (m.c.a)
 
(*) peut-être due à l’activité de réalisatrice pour le petit écran ( certains épisodes des séries « Cold case » et « The wire »), nécessitant que les émotions soient martelées pour s’assurer de leur compréhension par le moins subtil ou attentif des téléspectateurs.
(**) « Pollock » d’Ed Harris, « A history of violence » de David Cronenberg, « The hours » de Stephen Daldry
(***) pour ceux qui sont intéressés par l’utilisation de la musique de Beethoven sur le petit ou le grand écran, consulter le site suivant : http://www.imdb.com/name/nm0002727/ est enrichissant.