Audrey Dhana, Judith Magre Laurent Couson, Samuel Labarthe, Dominique Pinon
Le cinéma de Claude Lelouch ou le paradigme du superficiel présenté comme profond.
Et pourtant … les surprises ne manquent pas au cinéma. Comme dans la vie d’ailleurs.
C’est ainsi qu’il arrive que, quoique n’ayant aucune curiosité ou sympathie pour les films d’un réalisateur, on soit à l’occasion d’une leçon de 7ème art donnée par celui-ci (*), interpelée par son charme et sa vivacité, prête à revisiter un a priori.
A revenir sur un pré-jugé qui obscurcit la fraîcheur de réaction que l’on devrait avoir et garder pour chaque nouveau film.
Bête de caméra, comme on dit de Katherine Pancol qu’elle est une bête de plume et avec laquelle le cinéaste partage l’intention de transformer le quotidien des personnages en péripéties, Lelouch l’est depuis toujours.
Est-ce pour cela qu’il est un cinéaste intéressant ? Cette question qui existe depuis que « Les Cahiers » ont émis l’opinion d’une disparition sous le ridicule de son premier long métrage « Le propre de l’homme » n’a pas, 50 ans après, perdu de sa pertinence.
A nos yeux, ce n’est pas le ridicule (comme chacun le sait il ne tue pas nécessairement) qui discrédite les Lelouch mais leur facilité d’accès qui, sous prétexte de ralliement à la veine du cinéma populaire, confond spontanéité et artifices, naturel et maniérisme, authenticité et envie (accordons lui la circonstance atténuante d’être inconsciente) de satisfaire au besoin en les manipulant la candeur et le souhait des spectateurs de redevenir l’enfant-auquel-on-raconte-une histoire.
« Ces amours-là » n’échappe pas aux travers de la Leloucherie. Travers qui traversent 40 ans d’Histoire française par le biais de 3 amours vécues par la même femme. Fourre-tout narratif, sauvé parfois par une séquence qui étonne et enchante mais la plupart du temps parsemé d’un solide et narcissique besoin de raconter et de se raconter - encore et encore comme si la peur de ne pas être entendu et compris était le seul moteur de l’action.
La mise en scène logorrhéique et agitée - à l’image de la nervosité du réalisateur - vise tellement à séduire (à racoler ?) qu’elle en devient répétitivement agaçante.
Finalement, le moment de grâce de la master class du cinéaste a duré peu de temps.
Juste le temps d’une prestation. C’est au moment d’écrire le mot « show » que j’ai finalement cerné ce qui me navre dans le cinéma de Claude Lelouch.
Une impression d’être en présence d’un embobineur. De quelqu’un qui met en bobines les acteurs et en boîte le spectateur pour lequel le cinéma est avant une une occasion de sortir (et dès lors de s’en distraire) de son quotidien pour entrer dans celui des autres.
On n’est pas obligé d’être conquis par ce type de cinéma.
On n’est pas obligé non plus de le dénigrer.
On peut juste constater que l’on n’est pas du côté des « cinématocrates » (**) c’est-à-dire de ceux qui parlent de (presque) tout en racontant souvent n’importe quoi. (mca)
(*) ce 8 septembre dans le cadre du mini festival Brussels Movie Days qui se tient au Wolubilis. Le réalisateur était introduit et questionné par le journaliste et formateur de cinéma Olivier Lecomte qui sait, comme peu le savent, allier enthousiasme, connaissance, humour et mise en équilibrée valeur de son interlocuteur.
(**) néologisme inspirée par l’ouvrage collectif « Les Editocrates » paru récemment aux Editions La Découverte.