Jesse Eisenberg, Steve Carell, Kristen Stewart, Blake Lively,…
Alors que certains se réjouissent de ce rendez-vous annuel avec le réalisateur New-Yorkais, d’autres affichent déjà une mine blasée face à ce nouvel opus. Café Society, dont le titre fait référence à la société mondaine fréquentant les cafés et restaurants en vogue de la fin du 19e siècle et du début du 20e, est le 46e long-métrage de Woody Allen. Celui-ci nous entraîne une fois de plus dans le passé, mais la grande nouveauté est qu’il laisse derrière lui l’argentique pour tourner en numérique.
Nous sommes à New York, dans les années 30, et le jeune Bobby Dorfman (Jesse Eisenberg) n’a qu’une envie, celle de quitter le domicile familial afin de tenter sa chance à Hollywood. Son oncle Phil (Steve Carrel), un agent de stars très influent, accepte de le prendre sous son aile et l’engage comme coursier. Bobby rencontre alors Vonnie (Kristen Stewart), la secrétaire de Phil, et en tombe littéralement amoureux. Mais la belle est déjà prise et Bobby doit se contenter de son amitié, jusqu’au soir où elle débarque chez lui pour lui annoncer que tout est fini entre elle et son petit ami. Oscillant entre compassion et joie, Bobby ne peut s’empêcher d’entrevoir enfin la naissance d’une idylle avec la jeune fille.
Woody Allen dresse le portrait d’une époque, conduite par l’histoire d’amour du personnage principal, Bobby. Ce dernier n’est autre qu’une incarnation fictionnelle du réalisateur dans sa jeunesse. Raconté par son auteur au moyen de la voix off, le récit oppose New York et Los Angeles en toile de fond. Ces deux villes ont chacune leur style visuel bien distinct, magnifié grâce au talent du chef opérateur, Vittorio Storaro, triplement oscarisé pour Apocalypse Now (Francis Ford Coppola, 1979), Reds (Warren Beatty, 1981) et The Last Emperor (Bernardo Bertolucci, 1987). C’est ainsi que le film s’ouvre sur Hollywood avec ses couleurs primaires et solaires, tandis que New York, et plus particulièrement le Bronx, apparaît quelques minutes plus tard sous une lumière désaturée. Ces différences stylistiques vont avoir tendance à s’atténuer au fur et à mesure de l’avancée du récit, traduisant d’une certaine façon le point de vue de Bobby pour qui, au final, Los Angeles n’est peut-être pas plus extraordinaire que New York.
Le film est aussi une critique bienveillante sur Hollywood et sa superficialité, où les stars plus glamour que jamais, sortent de chez elles vêtues de fourrures durant l’été. Le judaïsme et ses croyants n’échappent pas non plus à la critique, on y voit l’un d’entre eux se convertir au dernier moment à la religion catholique, celle-ci promettant une vie après la mort. Au rythme du jazz, le réalisateur nous transmet ainsi la mélancolie d’une époque que nous n’avons pas connue, accentuée par l’utilisation de procédés cinématographiques (ouverture à l’iris, surimpression, fondu enchaîné). Café Society n’est peut-être pas la comédie romantique du siècle, mais elle reste une irrésistible chronique sur l’amour manqué.
( Nathalie De Man )