Vincent Valladon, Eddy Mitchell, Atme Kelif
Une big city pour un bien petit film. Qui pose, au niveau de sa lisibilité éthique, deux questions qui, même si elles ne sont pas neuves, gardent toute leur pertinente actualité.
Peut-on demander aux enfants de jouer n’importe quel rôle ? (*)
Peut-on permettre à tous les enfants, quel que soit leur âge, de voir leurs semblables dans des rôles captieux (**) sous le prétexte que le film est conçu pour eux ?
Une ville de l’Ouest américain dans les années 1880. Désertée par la grande majorité de ses adultes partis à la rescousse d’une diligence attaquée par des Indiens, elle est livrée à des enfants « encadrés » d’un vieil ivrogne (Eddy Mitchell (***) qu’on a connu plus en forme) et d’un idiot dit de village (Atmen Kelif déjà présent dans le premier film de Djamel Bensalah « Il était une fois dans l’Oued »).
Titre éloquent (c’était d’ailleurs la seule rhétorique de qualité d’un film quelconque) qui soulignait déjà l’intérêt du cinéaste pour le western, ce genre cinématographique qui permet d’aborder une foultitude de thèmes (le racisme, la violence, les rapports entre communautés culturellement différentes) et de les développer dans de beaux paysages.
On n’est pas dans le Montana mais en Bulgarie à quelques encablures de Sofia tout comme on n’est pas dans un monde d’adultes mais d’enfants qui les singent.
Et c’est là que les choses dérapent. En effet les enfants endossent les professions de leurs parents, tics, préjugés et vêtements inclus.
Ainsi donc une mignonnette de 10 ans sera, comme sa mère, la call girl locale accordant ses faveurs sous la forme de bisous, un garnement ne se contentera pas de sucer son pouce mais aussi la bouteille de malt du cru. Et last but not least un autre endossera le rôle du Ku-Klux man.
Il n’y a dans cette histoire aucune énergie, juste de la platitude qui le cède bien vite au mauvais goût.
Aucune autodérision ne vient éclairer le film d’un salutaire clin d’œil. Mais juste de la lourdeur qui s’enlise dans les plus convenus des clichés.
Les acteurs font ce qu’on leur demande avec l’entrain de leur jeunesse et une absence d’humour plutôt effarante.
Alors « Big.. » est-il le film à voir en famille comme le suggère une certaine publicité promotionnelle ? Ou plutôt un constat sur l’étonnante plasticité des enfants dont on peut se demander jusqu’où ils sont capables d’aller pour répondre aux désirs de leurs aînés ?
A moins que cette « plasticine-attitude » soit le monstrueux surgeon d’une société qui élève au rang de l’extraordinairement enviable le fait d’occuper une place en haut de l’affiche ? (m.c.a)
(*) Le débat soulevé par « La petite » de Louis Malle avec Brooke Shields
(**) Comme dans « Bugsby Malone » d’Alan Parker. Ue parodie de films de gangsters dans lequel les rôles sont tenus par des enfants dont une toute jeunette Jodie Foster qui, la même année, était l’Iris Steensma du « Taxi driver » de Martin Scorsese.
(***) Que l’on pourra applaudir sur les planches du théâtre de la Madeleine à partir du 29 janvier 2008 dans une pièce de Niels Arestrup « Le temps des cerises » avec comme partenaire… Cécile de France.