Coup de coeur
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Coup de coeurAN EDUCATION

Lone Scherfig

Carey Mulligan, Olivia Williams, Alfred Molina, Peter Sarsgaard, Dominic Cooper, …

95 min.
24 février 2010
AN EDUCATION

« An education » arrive tel un ovni parmi la distribution de films proposés sur nos écrans. L’histoire est celle de Jenny, jeune anglaise de 16 ans, passionnée par l’art et étudiant sagement dans un collège réservé à la gent féminine, histoire de se préparer à franchir les portes de la prestigieuse université d’Oxford.

Au cours d’une année capitale, Jenny va pourtant s’aventurer au-delà de ses frontières personnelles, celles qui définissaient un univers protégé et connu mais aussi incroyablement terne. Ce bouleversement aura les traits d’un homme nettement plus âgé, David, qui permettra à Jenny l’entrée dans un monde culturel aussi dense qu’intense, lui procurant un sentiment vibrant de vie. 

Ce récit, adapté des mémoires de la journaliste britannique Lynn Barder, est une chronique exceptionnelle sur une époque qui allait vivre une grande remise en question. Les années soixante, baignées d’un chromatisme particulièrement représentatif de l’époque, font un retour fracassant sur l’écran. 

Le tableau de la ville de Twickenham dans laquelle évolue la jeune Jenny expose à la fois l’imprégnation d’une mentalité conservatrice et l’effervescence d’une vie culturelle foisonnante. Plus tard, l’image de Paris, symbole d’évasion pour l’étudiante bercée par la littérature, la chanson et le cinéma français, viendra marquer un contraste accentué avec le quotidien de la banlieue londonienne. 

Cette représentation tout à fait particulière de ce que l’on appelle communément les « swinging sixties » , c’est à la sensibilité de la réalisatrice suédoise Lone Scherfig que nous la devons. En 2002, elle livrait déjà toute sa compréhension du psyché profond d’êtres tourmentés dans le très réussi « Wilbur Wants to Kill Himself » . « An Education » est pour elle l’occasion de s’intéresser à une héroïne moderne et digne, volontaire et courageuse. 

Ce rôle revient à Carey Mulligan qui livre une interprétation sensible et puissante, alliant sa frêle stature à une volonté solidement ancrée se modelant sur un visage polymorphe, visage sur lequel se dessinent tour à tour l’admiration, l’éveil, la curiosité, la tristesse, la colère et la combativité. 

Le climat social conformiste de la fin des années cinquante donne une substance supplémentaire à la question du libre arbitre. Mais il est sûr aussi que cette problématique conserve une résonance universelle. A travers le parcours initiatique de cette jeune anglaise, les dilemmes abondent, entre l’envie de suivre la raison ou celle d’écouter l’émotion, entre le cheminement tout tracé ou l’envol vers d’autres horizons, avec bien sûr, les risques que cela comporte. 

L’éducation ne se limite pas aux années d’apprentissage scolaire, aux livres et aux préceptes consciencieusement assimilés. Elle se trace parallèlement dans les choix posés. Comme l’apprend Jenny, toute décision donne lieu à d’autres enchaînements. C’est dans la découverte de sa voie personnelle et dans sa réactivité exemplaire que cette dernière s’impose comme l’une des figures féminines marquantes de ce début d’année cinématographique. 

(Ariane Jauniaux)