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Coup de coeurLE CHIEN JAUNE DE MONGOLIE

Byambasuren Davaa (Mongolie/Allemagne 2005 - distributeur : Cinélibre)

La famille Batchuluun dans son propre rôle

93 min.
22 mars 2006
LE CHIEN JAUNE DE MONGOLIE

Il n’est pas fréquent de sortir d’une salle de cinéma heureuse, apaisée et en même temps étrangement mélancolique.
Tout simplement à cause d’un film qui, à mi-chemin entre le documentaire et la fable, évoque la tendresse que se porte une famille et la poésie d’un mode de vie en voie de disparition.

Une petite fille, Nansa, aux joues couleur de pomme d’api, rentre chez elle pour les vacances d’été. Saison qu’elle va passer, avec les siens, dans une yourte isolée, plantée en pleine steppe d’une Mongolie magnifiquement filmée par une réalisatrice dont le savoir montrer n’a rien à envier à la majesté du prologue de l’œuvre de Mikhalkhov « Urga ».

Nansa ramène un jour un chien errant qui mettra du temps à se faire adopter par ses parents qui craignent, qu’au contact des loups, le canidé n’ait développé des tendances à mettre en danger le troupeau de chèvres et de moutons dont ils tirent l’essentiel de leur subsistance.
L’affection entêtée que Nansa porte à ce chien est soutenue par un conte qui lui est raconté par une très vieille dame (image de la sagesse universelle) et selon lequel les chiens jaunes trouvés
dans une grotte peuvent être utiles à l’équilibre d’une famille.

La narration simple, la justesse de l’interprétation des acteurs - tous non professionnels -, la beauté des gestes du quotidien (qui rappelle la simplicité lumineuse de ces tableaux hollandais
qui rendent hommage aux petites choses de tous les jours) auréolent ce film d’une gravité contemplative et nostalgique parce que le spectateur sait que ce mode de vie est menacé par une modernité qui tantôt reste hors champ (évocation d’une urbanisation qui se rapproche) tantôt est traitée avec une subtile dérision - l’épisode de la louche en plastique qui fond à la chaleur alors que le vieil ustensile en métal résiste à toutes les épreuves .

Comme il existe un type de musique appelée « world music », « Le chien jaune » pourrait inaugurer un nouveau type de film qui colle à l’idée que le monde est devenu un village : le « world movie ».

Ce genre de film qui vous permet de sentir que vous avez avec l’autre, même lointain, plus d’affinités que de disparités. Que vous partagez avec lui la même ambivalence face à une avancée du progrès à la fois souhaitée et redoutée. Que vous êtes capables de transcender les pièges du cinéma folklorique ou ethnologique pour en dégager une fraternelle universalité.

Cet hymne à la vie simple gagne à être vu en version originale tant la langue du cru s’harmonise à merveille avec la rudesse et la grandeur de son environnement géographique. (m.c.a)