Chronique sentimentale
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ENTRE ADULTES

Stéphane Brizé (France 2007 - distributeur : les Films de l'Elysée)

Edith Mériau, Jeanne Ferron, Cyril Couton, France Ducateau, Vincent Dubois

80 min.
28 février 2007
ENTRE ADULTES

Chez Schnitzler (« La ronde » portée au cinéma par Max Ophuls en 1950 et par Roger Vadim en 1964) ils étaient 10. Dix couples à dire ce qu’en général les hommes et les femmes essayent de dissimuler et de se dissimuler : aimer n’est pas facile.

Chez Brizé ils sont six à décliner la gamme des duperies et hypocrisies qui se nouent autour de l’acte amoureux. Contrairement à Schnitzler il n’y a pas d’incursion dans toutes les tranches de l’échelle sociale - on reste dans la bourgeoisie petite ou moyenne, mais comme chez Schnitzler c’est avec le même tact que sont évoqués les situations et fantasmes licencieux ou amoraux.

Douze femmes et hommes pris dans un jeu de séduction, de tromperie, de manipulation, confrontés à leurs mauvaise foi et lâchetés, du côté masculin, à leurs doutes et besoin de franchise du côté féminin. Chaque camp adopte vis-à-vis de la vérité une attitude différente : pour les uns il faut avant tout la fuir, pour les unes il faut la connaître aux risques d’en souffrir.

Stéphane Brizé pose sur la vie de ses personnages un regard attentif que les désabusés trouveront à juste titre sans illusion mais que d’autres peuvent trouver exagérément de parti pris. En effet dans chacune des saynètes, l’adultère est présenté comme nécessairement consubstantiel au déroulement d’une relation conjugale.

L’originalité d’ « Entre adultes » est d’avoir été, au départ, une initiation à la caméra de douze comédiens (tous excellents), écrite, tournée et montée en moins de vingt jours.

C’est à Claude Lelouch, dont on connaît l’intérêt pour tout ce qui touche à la vie amoureuse, et à sa maison de production « Films Treize », que l’on doit la sortie publique de ce film (*) qui présente plus d’un point commun avec des œuvres plus fictionnalisées « Closer » de Mike Nichols ou « Ice storm » de Ang Lee.

Les propos de ces cinéastes, s’ils cernent eux aussi les difficultés de vivre avec la même personne le sexuel et l’affectif ou d’être fidèle à un engagement, le font avec un sens critique voire sardonique absent du point de vue de Brizé qui privilégie une spontanéité donnant à son ouvrage une vraisemblance et une émotion en lesquelles chacun peut reconnaître les petits arrangements avec la vie qu’il s’accorde.

Il y a dans la simplicité et la justesse des dialogues de « Entre adultes » un je ne sais quoi de sombre qui souligne combien la médiocrité des situations vécues par les personnages est minée de mal être, de culpabilité et de remords.

Brigitte Roüan aurait-elle eu, finalement, raison de faire écho, dans le titre d’un de ses films, au vieil adage « Post coïtum animal triste » ? (m.c.a)

(*) dont la seue concession au format du grand écran a été un passage au scope qui donne aux plans rapprochés une ampleur et une intensité qui secouent.