Rattrapage , Qui suis-je ?
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MON ROI

Maïwenn

Vincent Cassel Louis Garrel Emmanuelle Bercot Ludovic Berthillot Camille Cottin Félix Bossuet

130 min.
21 octobre 2015
MON ROI

Quatre ans après « Polisse » où elle filmait le
quotidien de la brigade de la protection des mineurs de Paris, Maïwenn
nous revient avec une œuvre plus intime, « Mon roi », où elle revisite
la thématique classique de la passion amoureuse. Pour incarner les deux
personnages principaux, la réalisatrice a fait appel à Vincent Cassel et
à Emmanuelle Bercot, avec qui elle avait déjà collaboré sur « Polisse
_ ». Parmi les rôles secondaires, on s’amuse quelque peu d’y découvrir
Norman Thavaud, le youtubeur de « Norman fait des vidéos ».

Sur
le plan narratif, « Mon roi » nous raconte donc l’histoire de
Marie-Antoinette, alias Tony, admise dans un centre de rééducation après
une grave chute en ski. La psychologue tente de lui faire comprendre
que le genou qu’elle a voulu briser, c’est celui de son couple autrement
dit le « je-nous ». Si cela ressemble à de la psychologie de comptoir,
elle l’invite tout de même à y réfléchir. Tony commence alors un long
travail de reconstruction où la douleur physique laisse place à la
douleur psychologique nourrie par les souvenirs de sa relation amoureuse
avec Georgio. Dans ce centre, elle fait également la rencontre d’une
bande de jeunes qui va l’aider à retrouver la joie de vivre.

Lors
de la scène d’ouverture, nous voyons Tony filer à toute allure pour
ensuite disparaître derrière la montagne. Dans le plan suivant, nous la
retrouvons avec sa blessure au genou. Si la chute physique fait l’objet
d’une ellipse, en revanche, toute la chute psychologique va nous être
déroulée à travers des flash-backs. Ceux-ci nous dévoilent les moments
clés de leur histoire d’amour, à commencer par leur rencontre rythmée au
son du titre « Easy » de Son Lux, jusqu’à la rupture totale. Ces
séquences du passé durant lesquelles le cadre se resserre autour du
couple, contrastent avec celles du présent où la caméra laisse davantage
respirer son personnage féminin.

Cette structure à double
temporalité offre également un double regard, intérieur (passé) et
extérieur (présent), sur la relation amoureuse entre Tony et Georgio.
Car c’est dans les scènes au présent que Tony va avoir le recul
nécessaire pour prendre conscience de l’impact destructeur que cet homme
a eu sur elle. Notons toutefois que ce regard extérieur existe déjà
dans les flash-backs, à travers le personnage du frère de Tony,
interprété par Louis Garrel. Car c’est précisément dans le regard de ce
personnage extérieur à la relation, que l’amour entre Tony et Georgio
apparaît comme fou.

Au final, Maïwenn réussit à nous transporter
à travers une histoire d’amour qui, aussi ordinaire soit-elle, est
également extraordinaire par le réalisme avec lequel elle nous la livre.
Tout en évitant de tomber dans le pathos, elle apporte une sensibilité
dosée avec justesse dans les scènes qui racontent les instants de
bonheur du couple. Quant aux dialogues, ils viennent enrichir les
moments anodins du quotidien. Et même si elle choisit de nous raconter
cette histoire à partir du point de vue de Tony, Maïwenn ne prend jamais
parti. Ainsi, si le personnage de Georgio se présente comme étant le
roi des connards, il est beaucoup plus complexe que cela et surtout
brillamment incarné par Vincent Cassel. Mais Emmanuelle Bercot nous
livre également une remarquable prestation, récompensée par le Prix
d’interprétation féminine à Cannes, où elle présentait par ailleurs son
film « La Tête haute » lors de l’ouverture du festival.

Nathalie De Man

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