Rattrapage
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DEAD MAN TALKING

Patrick Ridremont

Patrick Ridremont, François Berléand, Virgine Efira

100 min.
3 octobre 2012
DEAD MAN TALKING

Comment être libre ?

Comment être libre quand on est enfermé dans une lugubre cage de fer, et dans des mauvais choix passés ?

William Lammers (Patrick Ridremont) a pris beaucoup de mauvaises décisions dans sa vie ; chacune d’elles l’a mené vers une condamnation à mort, mais le choix de toutes les conter, et de les étaler devant un public de plus en plus passionné lui permet de retarder son trépas, et peut-être, avec le concours de politiques avides de votes, d’annuler sa sentence.

Williams Lammers, Shéhérazade moderne, est un meurtrier, un monstre. Tous l’ont abandonné, même son ange gardien (sans doute « parti pisser » quand il avait besoin de lui). Il est violent, il est rude, il n’est rien, il est le vide. Pourtant on l’écoute, on écoute ses horreurs, ses tendresses, ses légèretés, ses vérités. Faiblesse humaine incarnée, miroir de la douleur la plus crue, il n’a rien à perdre et jouit de cette capacité inégalée de pouvoir dire ce qu’il pense ; il ose parler « sans avoir peur que l’on se moque », comme l’enfant qu’il aimerait encore être.

A côté de cette candeur terrible et d’un humour mordant, vendu par un personnage s’adressant au spectateur sans aucun artifice, il y a les mensonges, les jeux, les silences, le sérieux des politiques guindés et statiques filmés de manière surannée, qui jouent avec sa vie et semblent perdre une parcelle de leur âme à chaque fois qu’ils posent pour une photo officielle. William Lammers, lui, parle, et s’il dit sa vérité, et qu’on l’écoute, il existe. Les politiques parlent, mais ils ne disent rien, et au final, ce sont peut-être eux les vrais morts-parlants.

Dead Man Talking , c’est à la fois intelligent et simple, candide et construit, dramatique et comique. Les personnages sont riches, touchants, drôles, humains, et servent des perles de dialogues qui touchent directement la sensibilité, sans passer par la case cerveau.

Patrick Ridremont se fout de la morale, des principes, et mêmes des codes. Suivant une longue tradition belge, il fait fi de la dichotomie bon/mauvais, drame/comédie, réel/fantastique et offre un joli film bigarré, et juste, dont le seul mot d’ordre est la candeur et l’honnêteté, un film qui, au sortir de la salle, donne l’impression d’être humainement plus riche.

Aurélie Waeterinckx