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BALADA TRISTE DE TROMPETA

Alex De La Iglesia

Carlos Areces, Antonio de la Torre, Fernando Guillen Cuervo, Carolina Bang

107 min.
22 juin 2011
BALADA TRISTE DE TROMPETA

Balada triste de trompeta , dans son aspect immédiat et littéral, est un film « mosaïque », un patchwork de genres gorissime racontant l’histoire de deux clowns (d’une joyeuseté douteuse), Javier (Carlos Areces) et Sergio (Antonio de la Torre), qui s’entretuent (ou tentent de s’entretuer) pour l’amour d’une belle blonde (Carolina Bang). Malgré l’exercice de style et les acteurs excellents, voilà de quoi décrocher rapidement et quitter le cinéma avec ses jambes à son cou et l’estomac dans la gorge. Cette violente balade mérite cependant qu’on la regarde de plus près (si on en a, certes, le courage). Le cinéma espagnol en général (et même l’Espagne tout court) est hanté par les horreurs de la Guerra Civil. C’est à travers ce prisme qu’il faut suivre l’histoire de Javier, fils de résistant.

Le prologue situé dans les années 30, un peu éloigné de l’histoire principale, pourra sembler trompeur, mais ne l’est que trompeusement. D’apparence inutile et presque antinarratif, il offre une clé de lecture indispensable, qui justifie non seulement tout le développement des personnages, mais aussi le degré de violence représenté à l’écran. La « Balada triste », plus qu’une simple histoire de bagarres, traite de l’horreur comme héritage, des vestiges d’un passé historique condamnant irrémédiablement l’homme, le « bon » (Javier) comme le franquiste (Sergio) à tomber dans la folie. « C’est pas nous, c’est le pays qui part en couilles » [sic]. C’est en ce sens qu’il convient de comprendre les images d’archives distillées tout au long du film ainsi que le générique « médiatisé » presque « hors sujet » composé d’extraits de films de propagande, de classiques du cinéma, … qui ont marqué l’inconscient collectif et façonné le présent (à l’écran, et hors de la salle).

« Balada triste de trompeta por un pasado que murió » (*) : Nostalgie dans un monde qui, comme les visages de ces clowns à la recherche d’un idéal, a perdu sa grandeur et n’est plus qu’une cicatrice.

Álex De La Iglesia reste le maître des films indéfinissables : mélangeant plus de genres qu’il ne semble possible ou même sage, il parvient à réaliser une Balada plus qu’intéressante, un véritable défi pour le spectateur. Si le challenge vous attire, courez au cinéma, mais vérifiez auparavant que votre cœur soit bien accroché.

Aurélie Waeterinckx

(*) "Triste ballade de trompette pour un passé qui s’éteint". Chanson issue du film "Sin un adios" (1971)