Docu-fiction
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DANS LA PEAU DE JACQUES CHIRAC

Karl Zero et Michel Royer (France 2006 - distribution : Victory Films)

la voix de Didier Gustin

90 min.
21 juin 2006
DANS LA PEAU DE JACQUES CHIRAC

Il existe différentes sortes de bêtes : la bête de foire, de cirque ou de scène, la bête de sexe ou encore la bête féroce. 
Jacques Chirac est un peu tout cela à la fois transcendé en une espèce dont il est, depuis les quarante ans qu’il hante les antichambres et podiums du pouvoir, un représentant exemplaire : la bête politique.

Celle qui galvanise les foules avec des lieux communs et qui rallie sous sa bannière les indécis et les mécontents uniquement parce qu’il sait utiliser à son profit les circonstances du moment .

Le film co-écrit avec Michel Royer s’attarde, sans méchanceté mais plutôt avec une badinerie goguenarde sur les bourdes, les revirements d’opinions, les contradictions de celui dont la marionnette dans les Guignols de l’info fait rimer politique et cynisme, habileté et sottise.

Montage-puzzle réussi parce que calibré dans son souci de présenter la réalité d’une façon « abracadabrantesque » « Dans la peau.. . » est un accolement de documents d’archives télévisées dont la voix off qui imite celle de Chirac confère au film un je ne sais quoi de « pas grave » qui lui donne un côté léger, bien éloigné des docu-reportages pointus à la moulinette desquels ont été passés G.W Bush (« Fahrenheit 9/11 » de Michael Moore), Berlusconi (« Viva Zapatero » de Sabina Guzzanti) ou Amin Dada (de Barbet Schroeder).

Finalement ce film est presque comme une opérette dans laquelle tout finit - les tromperies, les veuleries, les promesses non tenues, les propos irréfléchis - sinon par s’arranger du moins par faire rire.

Avant tout malicieux, « Dans la peau » s’intéresse peu aux côtés franchement sombres du personnage laissant à Franz-Olivier Giesbert dans « La tragédie du président » le vilain rôle de celui qui dévoile les trivialités d’une vie dans laquelle l’impudence le dispute à l’inconséquence.

Il est intéressant de coupler ce film avec celui qui sort sur Zidane afin de saisir, à travers deux personnages emblématiques de la France contemporaine, la quintessence d’une époque axée sur le « je » où la cohérence et la moralité d’une conduite sont plus présentes chez un footballeur que chez un chef d’État.

Sommes-nous à ce point dans une société du « jeu » que la mise en perspective critique d’une parole politique n’est possible que si le ton qui l’anime est celui des « Deux ânes », ce théâtre où des chansonniers portent haut l’étendard d’un certain état d’esprit, fait de gaudriole et d’insolence, dont l’effet est de rendre, au bout du compte, sympathique celui qu’on départ on voulait critiquer. (m.c.a)