Ecran Total
3étoile(s) 3étoile(s) 3étoile(s) 3étoile(s) 3étoile(s)

WINNIPEG MON AMOUR

Guy Maddin (Canada 2007)

Ann Savage, Louis Neguin, Darcy Fehr

75 min.
28 juillet 2010
WINNIPEG MON AMOUR

Chouette ! Un film de Guy Maddin c’est l’assurance d’un moment d’excentricité. Classieuse et douce-amère.

Si Terence Davies est le chantre (dont la complaisance religieuse est parfois pesante) de Birmingham (*), Guy Maddin est devenu suite à une commande de la chaîne canadienne « The Documentary Channel » celui de sa ville natale Winnipeg.

Pour laquelle il va se transformer en Méliès moderne capable par une alchimie secrète entre le noir et le blanc de donner à la couleur grise un grain qui rappelle celui des pellicules anciennes.

Capable aussi de faire de nous des rêveurs éveillés, en apesanteur entre imaginaire et réalité.

Avec Maddin « Mappy.com » devient « Subjectivity.org ». Son intention n’étant pas de donner de Winnipeg une image juste.

Mais, selon une des expressions-phare de Godard, « juste une image ». Celle d’un inconscient - le sien.

Celle d’une nasse de souvenirs lointains égrenés - sans être affadis par la répétition - de film en film : la mère névrosée et toute puissante, le père lunaire, les stades de hockey …

Cinéaste obsessionnel par son souci d’être le chroniqueur de sa vie, « puer aeternus » qui se saisit du meilleur de ses maîtres - Lynch, Buñuel - pour faire de ses films des poèmes lyriques et baroques, Maddin est l’homme des audaces douces.

Plus à la marge que rebelle, plus narcissique qu’égotiste, il a le toupet inouï et candide de transformer une demande de documentaire sur une cité bruissante de 600.000 âmes en produit fini dont il est le centre et la périphérie.

Winnipeg dont il a intériorisé les vertus et les vertiges au point de faire de sa blancheur et de sa froideur la source de ses désirs et inhibitions personnels.

Quant à sa modernité trop galopante il en fera la racine de sa nostalgie.

Il existe une petite collection éditée par le « Mercure de France » qui s’appelle le goût des villes.

On se plaît à imaginer la même idée déployée en images par des réalisateurs de fiction.

Tavernier pour Lyon, Van Sant pour Portland, Mendoza pour Manille

Le tout sous les auspices d’un « oldie » dont le regard, même s’il est devenu plus people et moins "manhattannien", reste drôle et grave : Woody Allen (mca)

(*) "Of time and the city" (2008)