WHAT JUST HAPPENED

Basé sur la vie du producteur Art Linson, « What Just Happened » se veut être une satire explorant les dessous du monde du cinéma à travers quelques journées aux côtés d’un producteur, Ben, déployant toute son énergie pour se dépêtrer de ses tracas professionnels, entre une productrice exigeante, un agent hyper stressé, un acteur capricieux et un réalisateur à vif. Ce businessman qui a toujours relégué sa vie personnelle au second plan est pourtant peut-être sur le point de revoir ses priorités.

Malheureusement, ce qui aurait pu être une intéressante mise en abîme sur la création de films tourne en véritable fiasco tant le monde dépeint sous nos yeux peine à gagner en épaisseur. Il est impossible d’aborder ces personnages comme autre chose qu’une pure artificialité du grand écran et de ne pas remarquer que le film, qui se veut une dénonciation de l’envers du décor hollywoodien, ne parvient à développer aucun sous texte qui le rendrait crédible.

Derrière le mythe hollywoodien, qui aurait pu être un univers croustillant sujet à de nombreuses transgressions, cette histoire sans enjeux n’est donc pas à la hauteur des procédés qu’elle met en action. A nouveau, même si les nombreuses utilisations d’images accélérées tentent de traduire un rythme effréné de vie, elles faillissent cruellement à leur mission. Pire encore,elles produisent l’effet inverse, tant l’envie de découvrir l’intrigue s’efface rapidement pour faire place à un réel ennui, devant des lignes narratives manquant cruellement d’intérêt.

Et lorsqu’un vague suspense apparaît, le temps est tiré en longueur. En découle une attente qui tourne court pour faire place à une trop grande prévisibilité. Même les tentatives de subversions des personnages dans leur pseudo-dénonciation de l’envers du décor d’Hollywood ne parviennent pas à sonner justes.

De même, le processus d’autoréflexivité, présentant en miroir une salle de cinéma assistant elle-même à une projection ou le processus de production filmique, n’est qu’une vaine tentative d’intellectualisation qui, sans signification ou justification aucune, ne découle sur aucune profondeur.

Au niveau de l’interprétation, la présence de Sean Penn à l’écran est tristement inexistante et le jeu de Robert De Niro, perpétuellement en mode« second-degré », ne permet la naissance d’aucune empathie. Un casting de choc ne suffit pas à empêcher un film de couler. Il ne reste qu’à espérer que Barry Levinson, qui a fait ses preuves auparavant [1],renouera avec la subtilité.

Reste Bruce Willis, qui, quant à lui, doit bien être le seul à tirer son épingle du jeu. En acteur lunatique, autoritaire et irascible, il délivre l’une des seules respirations du récit. Reprenant son propre rôle dans une version parodique de lui-même, il s’avère être le seul à pouvoir prendre de la distance vis-à-vis du récit, mais surtout vis-à-vis de lui-même, délivrant de savoureuses crises de colère incontrôlées.

Pour terminer, notre mise en abîme personnelle serait que « What Just Happened » ne vaut guère mieux que le mauvais film de genre accompagné parle producteur de la diégèse, « Fiercely ». Et lorsque vous en aurez vu les extraits, vous saurez à quel point cela ne présage rien de bon. Pour finir, en sortant de la salle, on sera tenté de se questionner : que s’est il réellement passé ? La réponse est simple : pas grand-chose. (Ariane Jauniaux)

[1] Réalisateur, entre autres des films « GoodMorning Vietnam » (1987), « Rain Man » (1988),« Sleepers » (1996) ou encore « Liberty Heights » (1999)