Reconstitution d’un moment de l’histoire
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VICEROY’S HOUSE

Gurinder Chadha

Gillian Anderson, Hugh Bonneville, Michael Gambon, Simon Callow, Manish Dayal, Huma Qureshi, Om Puri.

106 min.
12 juillet 2017
VICEROY'S HOUSE

Delhi 1947. Lord Mountbatten (Hugh Bonneville), héros de guerre et arrière-petit-fils de la Reine Victoria est accueilli en grande pompe dans le luxueux palais du Vice-Roi. Accompagné de sa femme (Gillian Anderson) et de sa fille, il a pour mission d’assurer la transition pacifique de l’Inde vers l’indépendance après trois siècles de domination britannique. Sa tâche s’avèrera cependant bien plus complexe qu’il ne l’avait imaginée en raison des tensions sociales, politiques et religieuses qui émergent entre les communautés hindoues, sikhes et musulmanes. Tensions qui n’épargnent pas les 500 employés qui travaillent dans cette immense demeure aux fastes ostentatoires. Au même moment, le jeune serviteur Jeet prend son service dans la résidence du nouveau gouverneur. Il y croise Aalia, dont il était tombé amoureux lorsqu’il était encore un gardien de prison au Punjab, en charge de son père, le résistant musulman Ali Rahim. Or, la jeune femme est d’ores et déjà promise à un homme de sa communauté parti faire la guerre pour les Anglais, ce qui complique autant le projet romantique de Jeet que l’instabilité politique croissante.

À travers ce mélodrame présenté hors compétition dans le cadre de la 67ème Berlinale, Gurinder Chadha ré-ouvre une page sombre de l’histoire géopolitique d’un pays au bord de la guerre civile et relit de manière sentimentale les déchirements qu’a connus sa propre famille. En multipliant les points de vue, la cinéaste revient sur les composantes complexes qui ont mené à la partition de l’Inde en deux entités (l’Inde et le Pakistan) et fait œuvre de mémoire en nous rappelant que cette scission a donné lieu au plus grand exode qu’ait connu l’humanité.

Même si l’on ne peut prétendre que Viceroy’s House soit une fidèle reconstitution historique des faits, la cinéaste s’efforce néanmoins avec une grande sincérité de révéler le dessous des cartes de tractations pour le moins équivoques à la lumière des motivations politiques et économiques des différents partis en présence. Mélangeant épopée romantique et récit historique, ce film aux décors flamboyants n’a point lésiné sur les moyens en termes de figuration et offre aux spectateurs un voyage impérial vers une contrée encore marquée aujourd’hui par les cicatrices d’une déplorable tragédie humaine et culturelle. Même si certains pourraient reprocher à Viceroy’s House sa romance un tantinet naïve et doucereuse ainsi que son grand classicisme, il atteint néanmoins un objectif d’utilité pédagogique non négligeable et confère une pertinente résonance au chaos qui règne toujours dans cette région du monde et qui avait d’ailleurs été prophétisé par Gandhi.

(Christie Huysmans)