UNE NOUVELLE AMIE

Suite au décès de sa meilleure amie Laura, Claire sombre dans une profonde dépression. Cette perte va la rapprocher du mari de la défunte qui de son côté a trouvé un moyen assez étrange pour faire le deuil de sa femme … (*)

Avec des touches de mélodrame, d’humour décalé et une thématique évoquant le cinéma de d’Almodovar, mais avec une atmosphère de tension et de mystère plutôt Hitchcockienne, le nouveau film de François Ozon fusionne les genres et en étire les limites. Mélange des genres cinématographiques, mais aussi mélange des genres masculin/féminin, « Une nouvelle amie » questionne l’identité sexuelle et joue avec les ambiguïtés, avec la transgression et ce qui est généralement accepté par la société ; une société où la femme a du se masculiniser (du moins dans le monde du travail) mais où l’homme n’a toujours pas le droit de revendiquer sa part de féminité sans être automatiquement catalogué d’homosexuel (alors qu’il peut être hétérosexuel…) voire de pervers ! « Une nouvelle amie » est aussi un conte sur la différence, la tolérance, sur la liberté et la nécessité de sortir des sentiers battus pour trouver sa vraie identité et vivre pleinement.

Romain Duris, qui rêvait de jouer un jour le rôle d’une femme, réalise ici son rêve avec brio car son interprétation touchante et juste ne devient jamais caricaturale ou grotesque (malgré une difficulté qui saute au yeux : celle de ne pas avoir le physique plutôt androgyne d’un Gael García Bernal bluffant de féminité dans « La Mauvaise éducation » ou d’un Jared Leto oscarisé pour son rôle de femme transsexuelle dans « Dallas Buyers Club ». Précisons aussi qu’en endossant le rôle de David/Virginia, Romain Duris n’interprète ni un rôle d’homosexuel ni de transsexuel, car David aime les femmes, et s’il éprouve le besoin de se travestir en Virginia, c’est parce qu’il aimerait être une femme. Un autre personnage en quête d’identité est celui de Claire, qui semble vraiment s’épanouir en tant que femme au contact de Virginia, alors qu’elle avait vécu dans l’ombre de son amie Laura jusque là.

Captivant, étonnant, parfois provoquant et même dérangeant, « Une nouvelle amie » est avant toute chose un film marquant et émouvant. C’est aussi une des plus belles œuvres de François Ozon à ce jour.

Nadia Vodenitcharov

(*) « Une nouvelle amie » est une adaptation libre d’une nouvelle de Ruth Rendell, « Une amie qui vous veut du bien ».