Film de guerre
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THE GOOD GERMAN

Steven Soderbergh (USA 2006 - distributeur : Warner Bros)

Cate Blanchett, George Clooney, Tobey Maguire

108 min.
14 mars 2007
THE GOOD GERMAN

Le charme du noir et blanc est , sans en être la seule (*), la bonne raison d’aller voir ce film. Son traitement glacé et lumineux des deux couleurs, déjà initié en 1991 dans « Kafka » atteint ici un sommet.

Quelques jours avant la partition de l’Allemagne, Jake Geismar (George Clooney) retourne en Allemagne pour y retrouver son ex-amie Lena sous l’alibi de couvrir, en tant que journaliste, la réunion des chefs d’Etats qui participent aux accords de Potsdam.

« The good german » est accessoirement une histoire, il est surtout un hommage aux plus beaux films produits par les studios des années quarante : "The third man" (London Film Productions), "Berlin express" (R.K.O.), "Casablanca" (Warner), "A foreign affair" (Paramount), "Allemagne année zéro" (Produzione Salvo d’Angelo)

Soderbergh est (re)connu pour ses qualités de styliste, avec ce film il devient une sorte de grammairien qui possède tellement bien la technique de ses moyens d’expression (l’éclairage, la reconstitution en studio des décors, l’articulation d’images d’archives et fictionnelles) qu’il la transforme en esthétisme.

Il pousse même l’exercice jusqu’à s’interdire d’utiliser d’autres objectifs, cadrages, moyens d’enregistrer la voix - la perche et non le micro - et musiques, que celles des années quarante.

Ce parti pris formel s’accompagne de consignes strictes demandées aux acteurs : jouer avec l’emphase théâtrale de l’époque Ce qui donne à l’entreprise quelque chose de démodé et de suranné comme quand on visite un étal de vieilles cartes postales.

Cette prise de position donne à la vision d’une Allemagne dévastée et vaincue une fausse impression d’être en terrain connu alors que l’époque était pleine de chausse-trappes à l’égal de cet instantané célébrissime de la poignée de mains Churchill/Staline alors que la guerre froide a déjà éclaté.

Très vite Jake se trouve impliqué dans le monde de tout après-guerre, fait d’hypocrisies, de traitrises, de marchés noirs, de débauches de cerveaux parce qu’ils sont à la pointe d’une science nucléaire et spatiale dont l’Amérique a besoin.

Quant à Léna, elle évoque l’héroïne de ce journal anonyme « Une femme à Berlin » (*) en soulevant la question (morale ou existentielle délà présente dans "Zwartboek" de Paul Verhoeven) de savoir jusqu’où est-on prêt à aller pour rester en vie ?

Hollywood, paraît-il, n’a pas apprécié « The good german » au prétexte que le traitement de l’intrigue, trop éloigné du modus operandi moderne, est frustrant.

C’est peut-être aussi et surtout parce que Soderbergh est un électron libre, un cinéaste qui conçoit son travail comme il l’entend, en dehors des circuits prémâchés. Il n’est jamais là où on l’attend, lui le spécialiste du grand écart entre d’une part des films marginaux "Solaris" ,"Schizopolis" et d’autres essentiellement commerciaux "La saga des Oceans". (m.c.a)

(*) Cate Blanchett, en Léna, est magnifique. Un condensé tragique et glamour des grandes stars d’antan - Marlène Ditectrich, Ingrid Bergmann, Merle Oberon....
(**) paru récemment aux éditions Gallimard, collection « Témoins ». "The good german" est aussi adapté d’un livre, en fait un thriller de Joseph Kanon (Ed.Belfond)