Fantastique
2étoile(s) 2étoile(s) 2étoile(s) 2étoile(s) 2étoile(s)

THE DORM ou LE PENSIONNAT

Songyos Sugmakanan (Thaîlande 2007 - distributeur : Jekino)

Charlie Trairat, Jintara Sukaphatana, Sirachuch Chienthaworn

107 min.
11 juin 2008
THE DORM ou LE PENSIONNAT

Quand le film fantastique se décline avec raffinement ça donne « The dorm ». Et ca donne des frissons.

Des frissons plus que de la peur. Quelque chose d’éthéré, de vaste, d’insaisissable qui touche à l’indicible des moments clefs de la vie. Ceux où l’enfance bascule dans l’adolescence. Où la cellule familiale explose. Où la communication avec l’autre se fait plus difficile.

« The dorm » a été récompensé par l’Ours de Cristal à la Berlinade de 2007.

Ce prix décerné par un jury d’enfants - le pendant allemand du Prix du Jury Junior du festival de Namur - est un choix pertinent parce qu’il révèle la sensibilité d’une jeunesse aux inquiétudes qui peuvent assaillir l’un des leurs lorsqu’il est transféré, en plein milieu d’un semestre scolaire, dans une nouvelle école.

Aux raisons secrètes qui motivent cet arrachement à la maison se noue un autre mystère. Lié à une piscine qui a dû fermer le jour où un élève s’y noya et au sentiment de culpabilité du professeur chargé de la surveillance ce jour-là.

Deuxième réalisation (*) de Songyos Sugmakanan, « The dorm » est à la fois une œuvre dont les envols poétiques atténuent l’impact anxiogène, une autobiographie parce ce que le cinéaste a puisé dans les souvenirs de ses années de pensionnat et une fable.

Qui arrive à rendre belle et touchante l’amitié qui aide à supporter les non-dits et les méchancetés proches de la cruauté de compagnons de classe malfaisants.

Peu importe que cette amitié se situe en dehors du réel - les amis même (et surtout) imaginaires ont une fonction (« Donnie Darko » de Richard Kelly, « Opal dream » de Peter Cattaneo) - si elle permet de panser des plaies, de mener sur le chemin de la mutuelle compréhension et du pardon.

Il y a quelque chose de christique dans « The dorm » qui se mélange, avec une paradoxale douceur aux histoires de fantômes dont le cinéma asiatique est friand (« Dark water » de Hideo Nakata)

Si la mise en scène s’enlise parfois dans un académisme de bon élève (plus que de bon aloi), la mise en sons particulièrement inventive apporte au film une dose d’inattendu.

Et de fantastique qui donne à penser qu’il n’y a pas que l’Alice de Lewis Caroll à pouvoir traverser
les miroirs.

Ou que l’élève Törless (**) à supporter les solitudes et désarrois d’un monde scolaire prompt aux silences et aux bizutages dans lesquels, si on n’y prend garde, l’humain peut vite devenir hostile. (m.c a)

(*) Incluant un extrait de film de vampires, mini court métrage réalisé, avec un réjouissant brio, par Sugmakanan lui-même. Manifestement inspiré par le jeu de celui qu’on appelle le "Vampire buster" du cinéma fantastique ou d’horreur asiatique : l’acteur Lam Ching-ying.
(**) « Der Junge Törless », le premier film de Volker Schlöndorff adapté du roman de Robert Musil « Die verwirrungen des zoeglings Törless » Avec dans le rôle principal un magistral Mathieu Carrière