Action
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THE AMERICAN

Anton Corbijn (USA 2010)

Thekla Reuten, Irina Björklund, George Clooney Violante Placido, Paolo Bonacelli

105 min.
27 octobre 2010
THE AMERICAN

De l’influence de la géographie sur l’atmosphère d’une narration.

Avant de comprendre que les Abruzzes ne font pas partie d’une intention « dépliant touristique » du réalisateur mais est partie intégrante d’une intrigue lente, froide, labyrinthique, il en faudra du temps.

Le temps, une des vertus cardinales, de ce film qui suit la préparation d’un tueur à gages dans sa dernière mission (*).

Il y a quelque chose de Sergio Leone dans la façon, esthétique et fataliste, dont Anton Corbijn suit (traque ?) son personnage principal sommé par son employeur de se faire oublier dans une région perdue de l’Italie.

Dont le décor montagneux, austère, zébré de routes dont la rectitude contraste avec les pics et sommets qui la cernent souligne et emphase les prises de conscience désabusées, dépressives, d’un (anti)héros que l’on pressent à bout d’envies, à bout de course.

Ceux (présumant qu’il est quasiment impensable que cet adjectif puisse se décliner au féminin pour George Clooney) qui sont peu sensibles aux mimiques « nexpresséiques » de l’acteur seront d’abord décontenancés et puis agréablement surpris de sa composition intériorisée d’un homme dont les dernières illusions volent en éclat.

Sans scrupule mais gangrené par des états d’âme, hanté par un passé dont il s’attribue la noirceur culpabilisante - précision qui l’éloigne de ses condisciples melvillien « Le samouraï » ou tuttlien « This gun for hire » (**) dont les parcours restaient définitivement plus opaques - Clooney donne à la notion de désenchantement une puissance plombante.

Transformant en entropie ce qui lui reste d’énergie.

On peut juste regretter que le côté Mies Van Den Rohe, hollandais comme le cinéaste et maître de l’architecture minimaliste, de « The american » s’empâte d’improbables histoires sentimentales qui distraient, d’une façon inutilement et (trop) longuement romanesque, d’un parcours d’homme au-dessus de la tête duquel la mort, dès sa première apparition à l’écran, avait déjà croisé les doigts.

Même si sa deuxième réalisation n’atteint pas la splendeur spleenique de « Control », elle installe l’intérêt de Corbijn pour les êtres brisés.

Donnant ainsi à son cinéma un imprimatur proche des tragédies antiques (mca)

 

(*) Histoire inspirée par le polar au titre équivoque de Martin Boothe "A very private gentleman"
(**) avec Alan Ladd, magnifique, dans le beau film de Franck Tuttle