Ecran témoin
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TENDER SON - THE FRANKENSTEIN PROJECT

Kornél Mundruczo (Hongrie/Allemagne 2010)

Lili Monoti, Kata Weber, Rudolf Frecska, Kornél Mundruczo

102 min.
6 juillet 2011
TENDER SON - THE FRANKENSTEIN PROJECT

Suffit-il que les lumières s’éteignent, que la projection commence pour que s’installe le miracle ?

Le miracle d’un film qui emmène dans une réalité qui distraie du quotidien et en élargit les fades et répétitives couleurs.

S’il n’en est pas toujours ainsi, l’espoir qu’il en soit ainsi est toujours là. Présent à chaque début de séance.

Plus présent encore lorsqu’on a déjà eu l’occasion d’apprécier le travail du réalisateur.

Que reste-t-il dans « Tender son » du lyrisme dramatique de « Johanna », de la tension autour d’un secret de « Pleasant days » et du désir d’un frère et d’une sœur , dans « Delta » de vivre leur amour loin du jugement d’autrui ?

L’essentiel.

A savoir continuer à scruter la nature humaine, à gratter les enjeux qui se tapissent derrière les relations entre les êtres.

Si les thèmes chers à Kornel Mundruczo sont là - les désillusions, l’innocence, la famille et ses difficultés, la violence, la fragilité, la filiation [ biologique et cinématographique (*)] - la façon de des développer a perdu ses vibrations.

Comme s’il y avait un épuisement nerveux de la matière passionnelle de ses récits, une redondance de la « méthode » qui affadit une esthétique jusqu’ici singulière. Faite d’une beauté formelle et audacieuse entièrement mise au service d’une histoire qu’elle entend mouler au plus près.

Mouler sans étouffer. Sans étrangler.

Respiration qui précisément manque à « Tender son » dont le propos - à 17 ans, après une enfance passée en institution, Rudi revient chez lui. Qu’y trouvera-t’il ? - suffoque sous un excès de maniérisme et de raideur.

Exagérément amidonnés et glaciaux.

L’épure est une forme géométrique qui demande le sacrifice de tout ce qui est accessoire à son dessin (dessein ?)

Sans néanmoins que soit gommée la sensibilité des personnages.

Ici, la solennité et la pose du regard du cinéaste non seulement enlèvent à la narration une partie de sa clarté - sommes-nous dans un conflit père/fils, dans une métaphore des rapports créateur /créature (**) ou dans une expression des traumatismes d’un pays, la Hongrie, longtemps soumis au joug soviétique - mais aussi de sa subtilité.

Très vite la vitalité scopique du spectateur s’empâte .

Gagné par un ennui qui même lorsqu’il est cueilli par l’imprévisible d’une scène finale d’une immaculée puissance n’arrive pas à dissiper l’apathie qui le rend presque indifférent à la rédemption suggérée.

Comme quoi pour que des effets restent opérants, ils doivent intervenir à temps.

Avant que l’instinct de désœuvrement n’ait raison de celui de l’attention. (mca)

(*) Kornél Mundruzczo s’est attribué, pour l’inscrire sans doute dans une plus grande crédibilité de proximité, le rôle du père de Rudi et de celui du cinéaste qui a comme projet de faire un film dans le film.
(**) comme le suggère la référence explicite du titre au personnage de Frankenstein imaginé par Mary Shelley.