Pour un samedi soir
1étoile(s) 1étoile(s) 1étoile(s) 1étoile(s) 1étoile(s)

SPORT DE FILLES

Patricia Mazuy (France 2011)

Marina Hands, Josiane Balasko, Isabel Karajan (*), Bruno Ganz

101 min.
1er février 2012
SPORT DE FILLES

Elle a un prénom de fée, Gracieuse. Comme dans le conte de Madame d’Aulnoye.

Elle rêve d’être cavalière, elle est palefrenière dans un haras.

Elle partage l’écran avec des chevaux magnifiques et 3 femmes qui le sont moins - Josiane Balasko en propriétaire d’écuries, rosse et autoritaire , Amanda Harlech en maquignonne, américaine et riche et Isabel Karajan en bête de concours, docile et infantile.

Elle, c’est Marina Hands. Une jeune femme mal embouchée, sauvage et attachante par sa détermination à vouloir s’occuper d’un cheval pour le dresser à sa façon. Sans dépendre d’un employeur qui peut à tout moment décider de le vendre.

Jusqu’ici le récit, même s’il n’est pas bien passionnant, fonctionne grâce à une cohérence tirée de la confrontation de personnages aux caractères et éthiques différents

Mais très vite le déséquilibre s’installe. Il porte le nom de Bruno Ganz.

Un vieux maître et ancien champion du dressage qui sait tout faire : parler aux animaux, séduire les femmes et avoir l’énergie, après 20 ans de sujétion auprès de Madame Balasko, de partir pour recommencer ailleurs une vie nouvelle.

Avouons-le tout net. Il est parfaitement insupportable en séducteur septuagénaire qui semble avoir oublié que le ridicule peut tuer et dont la condescendance à ne s’adresser aux femmes qu’en les appelant « mon petit chat » devient très vite un puissant émétique.

Dans son épatant « Saint-Cyr », Patrica Mazuy a choisi de raconter une page d’histoire. Dans « Sport … » elle garde cette envie de poser sur un Monde à part, mystérieux parce que replié sur lui-même - celui des grands domaines équestres où l’on dresse les chevaux pour les (re)vendre au prix fort - le même regard réaliste qui cerne les cruautés psychologiques et brutalités d’un système.

Basé sur la hiérarchie, le pouvoir de l’argent et le fait d’être née du bon côté de la barrière.

Mais si cette envie est la même, sa mise en scène (ici numérique) la soutient avec moins de pertinenece. Parce que peu à peu gangrenée par une relation amoureuse peu convaincante, une opposition caricaturale de profils féminins et de classes sociales.

Et surtout une illusion de croire que l’on peut en trois semaines - quelle manque de considération pour ceux qui mettent des années à y parvenir - devenir une compétitrice-dresseuse de qualité.

Illusion qui sape la vraisemblance du film et en transforme l’intention de base - suivre l’héroïne dans sa rageuse volonté de faire de son rêve une réalité - en convention scénaristique lourde qui finit par lasser l’attention du spectateur.

Qui ne retiendra de ce film que si « parlante » soit-elle, la musique de John Cale (*), fût-elle à la fois lancinante et énergique, ne suffit pas à soutenir les impuissances à communiquer d’une âme obsessionnelle.

Quant au choix de métaphoriser la rage de trouver et prendre sa place par un bandeau sur l’œil (hommage dixit la réalisatrice au foulard porté par Lee Marvin dans « 7 hommes à abattre » de Budd Boetticher) nous laisserons à chacun la clé de son décodage.

La nôtre n’y voit que coquetterie, certes seyante et allurée, mais à l’image du film, très artificielle. (mca)

(*) "Sport de filles" et... "Sports d’enfants de". Isabelle est la fille de Herbert, Marina celle de Ludmila Mikaël et Simon Reggiani( au script) celui de Serge.

(*) déjà signataire de la sublime et intemporelle bande son de « Saint Cyr »