Tranche de vie
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SILENT SOULS ou le dernier voyage de Tanya

Aleksei Fedorchenko (Russie 2009)

Yulya Aug, Igor Sergeyev, Yuriy Tsurilo

75 min.
5 janvier 2011
SILENT SOULS ou le dernier voyage de Tanya

The Corpse Bride (*).

 

Ou l’union des souvenirs personnels et des traditions collectives (**) pour accompagner une jeune morte dans son dernier voyage.

Quelque part sur les bords d’un fleuve dans le Nord de la Russie, un mari, accompagné d’un ami, souhaite pour les funérailles de son épouse Tanya respecter les rites d’un peuple presqu’oublié, les Meria.

« Silent souls » est un film étrange. Qui se décline sur deux plans. Auxquels on peut ne pas être également sensible.

Ainsi si sur le plan formel, ce voyage fascine parce qu’il a quelque chose de la spiritualité mystérieuse qui accompagne le lent glissement des disparus sur le Styx mythique, sur le plan du contenu il suscite un questionnement moins … magique.

Lorsque le spectateur émerge de son envoûtement pour des paysages majestueusement filmés (comme ils le sont sur un mode poétique dans les films d’Andréi Zvyagintsev) et de sa curiosité pour un déploiement de protocoles ancestraux qui sacralisent deux des repères essentiels de l’existence - le sexe et la mort, il est confronté à une réalité nettement plus problématique..

En effet, dans « Silent souls » - titre qui rend bien plus profondément que sa traduction française la pesanteur (alourdie encore par une didactique voix off) et la tristesse d’un voyage dont on soupçonne que les « pèlerins-accompagnateurs » ne reviendront pas intacts - l’existence se vit avec une animalité et une sensualité à la masculinité souvent dérangeantes.

Qui semble peu tenir compte, dans les moments de communion charnelle, de la complicité spontanée de la partenaire.

Donnant la désagréable impression que le corps féminin est traité avec moins de respect que la nature environnante et sa libido pointée comme intéressante si elle s’insère (s’incarcère ?) dans une ambiance de passivité donnant à penser que son désir personnel compte peu face à celui de l’homme.

Le film est court (75 minutes), froid en raison d’une description de souvenirs érotiques trop minutieuse et insuffisamment amoureuse, lourdement métaphorique - on a compris très vite que le réalisateur déplore la disparition progressive des coutumes de ceux qui vivent en marge de la modernité mondialisée.

« Silent… » est un bon exemple des impasses auxquelles conduisent une esthétique exagérément mise en scène alliée à une habileté trop appliquée à riper de travellings en lents zooms arrières.

Elles amènent sans la tendresse qui accompagne chacun des gestes des thanatopraticiens du "Departures" de Yojiro Takita à l’inutile, au redondant et au maniérisme. .

Pis encore à l’ennui.

Comme celui que devait éprouver Tanya avec un époux qu’elle subissait sans l’aimer. (mca)

(*) en français « Les noces funèbres » de Tim Burton

(**) une très intéressante exposition sur un sujet semblable se tient actuellement au Musée du Cinquantenaire et ce jusqu’à la fin avril 2011. Son thème : les rites funéraires ou comment mourir au Moyen Age. Son titre : Entre Paradis et Enfer.