Autour des réseaux sociaux
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PLACE PUBLIQUE

Agnès Jaoui

Jean-Pierre Bacri, Agnès Jaoui, Léa Drucker, Kevin Azaïs, Nina Meurisse…

98 min.
18 avril 2018
PLACE PUBLIQUE

Grâce à la magie des réseaux sociaux, en un post[ Post : mot anglais désignant une publication.], tous nos moments privés sont jetés sur la « Place Publique ». Pour le meilleur et pour le pire. La nouvelle comédie signée Jaoui-Bacri au scénario, Jaoui à la réalisation et tous les deux en tête d’affiche, veut, en passant, nous rappeler cela.

Le film nous convie à une soirée dans un château entouré d’un magnifique jardin, à seulement 35 minutes de Paris, organisée par Nathalie, une productrice télé, connectée non stop à son oreillette, qui vient d’y emménager. L’invité d’honneur est Castro, son ami de longue date, soit Jean-Pierre Bacri endossant costume noir et lunettes de soleil façon Ardisson, dans le rôle d’un célèbre présentateur télé dont la popularité décline avec l’âge. Son cynisme, lui, n’a pas pris une ride et nous vaut une belle caricature d’un type qui a du pouvoir et qui se permet d’être une vraie merde avec les autres.

Fort affecté par son propre vieillissement, Bacri nous offre aussi le plus touchant de lui-même avec, notamment, sa déraisonnable jalousie envers sa plus jeune et toujours ravissante compagne ex-miss météo qu’il surveille avec son « appli-taxi ».

Le thème principal est la question de l’absurdité du pouvoir ici conféré par la célébrité née du show business, mais aussi des changements qui s’opèrent dans la société, où l’on pourrait dire aujourd’hui « Youtube kills the tv-star »[ En reference de la célèbre chanson “Video kills the radio star” reprise par The Buggles en 1979]. En effet, la télévision est devenue has been et les nouvelles idoles des jeunes sont des youtubeurs, dont un des plus célèbres est de la partie, entouré de son jeune fan-club.

Telle une chorégraphie, les invités arrivent et nous les découvrons petit à petit. Tirant profit des différentes possibilités qu’offre le genre comique, Agnès Jaoui nous propose des stéréotypes, comme celui du fermier bobo qui vit à côté et dont la façon de serrer la main devient un running gag. Si le début paraît un peu lent et un tantinet lourd, justement à cause des stéréotypes, cette mise en place s’avère nécessaire et bien pensée afin de se sentir entièrement dans cette fête, dans ce huis clos au-dessus duquel plane l’inquiétante scène d’ouverture qui laisse présager une catastrophe imminente.

Au-delà de l’inépuisable clash qui confronte les différentes classes sociales, le film nous parle avec sagesse du vieillissement, déballant avec jouissance les angoisses qui en découlent et parvenant, avec simplicité et finesse, à les dédramatiser. Un film qui nous réconcilie avec notre époque.

Luz