MAGGIE’S PLAN

Maggie (Greta Gerwig), trentenaire, new-yorkaise, éternelle célibataire, est intimement persuadée qu’elle ne sera jamais capable de vivre une relation stable et durable. Mais le tic-tac de son horloge biologique se faisant entendre avec insistance, elle décide de faire un bébé toute seule… ou presque. Pour réaliser son rêve de future maman, elle sollicite la contribution d’un ancien copain de lycée, passionné de mathématiques en son temps, et désormais devenu chef d’entreprise dans le commerce de cornichons. Cependant, au moment de mettre à exécution son petit plan bien ficelé, elle fait la rencontre de John (Ethan Hawke), professeur d’anthropologie, écrivain balbutiant et marié à Georgette (Julianne Moore), une femme dragon aussi ambitieuse qu’égocentrique.

Comédie romantique sans grande prétention, très chaleureusement accueillie lors de la dernière Berlinale où elle concourait dans la catégorie Panorama , Maggie’s Plan est un heureux pêle-mêle amoureux et familial qui explore avec autant de légèreté que de modernité les relations de couple, la parentalité et le très à la mode « lâcher-prise ». En rompant avec les stéréotypes du genre, Rebecca Miller réalise une comédie sentimentale dont l’intrigue se développe à rebours d’un sirupeux conte de fées : la candide Cendrillon se rend en effet très vite compte que son prince n’est pas aussi charmant qu’il y paraissait à première vue et que les premiers émois passés, elle est en passe de se transformer en souillon esseulée si elle ne réagit pas énergiquement sans craindre d’user de son excentrique créativité. 

A priori l’on pourrait penser que la réalisatrice américaine, qui abandonne le registre dramatique pour ce cinquième long-métrage, s’est laissée emporter par une débordante inventivité en ne redoutant pas de placer ses protagonistes dans certaines situations hautement surréalistes. Mais l’éternel jeu de l’amour et du hasard, qui, par esprit de contrariété, aime se gausser des lois de la probabilité, ne se révèle-t-il pas plus souvent riche en bonnes et mauvaises surprises que l’on n’oserait se l’imaginer ? L’Amour demeurerait-il encore le sujet le plus fécond artistiquement et le plus fréquemment décliné si son équation tenait à une arithmétique unique et parfaitement soluble ? Rebbeca Miller tord gentiment et joyeusement le cou aux conventions et aux idéaux traditionnels, et ne se prive pas non plus pour tourner en dérision l’éternelle guéguerre à laquelle se livrent habituellement l’ex-épouse, quadragénaire délaissée subitement par un adolescent en crise existentielle, et la jeune ingénue, prête à croire qu’elle est devenue la muse indétrônable du mâle inespéré.

Tantôt loufoque tantôt jubilatoire, Maggie’s Plan n’est certes pas un film incontournable en dépit de son joli casting mais il remplit pleinement son office en proposant un très honorable moment de divertissement. 

( Christie Huysmans )