Comédie sentimentale
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LES PETITS RUISSEAUX

Pascal Rabaté (France 2010)

Bulle Ogier, Hélène Vincent, Daniel Prévost, Philippe Nahon

90 min.
15 juillet 2010
LES PETITS RUISSEAUX

Le rut dans le ru.

Ou encore est-il vrai que nous ne cessons jamais de penser au sexe ?

Quelle évolution depuis le film des années 1960 de Gilles Grangier « Les vieux de la vieille » dans lequel l’horizon des sexagénaires était la maison de retraite.

A mille lieues de la polémique socio-politico-syndicaliste qui alimente les nécessaires (nous dit-on) réformes des systèmes de pensions, « Les petits ruisseaux » rafraîchissent à la fois une atmosphère plombée de questions : comment occuper son temps quand on est âgé, divorcé ou veuf et à la fois la mémoire en se souvenant d’une époque baba cool où manifester son désir était aussi naturel que se tartiner une brioche de Nutella.

Le film de Pascal Rabaté inspiré de sa bande dessinée - comme « Les beaux gosses » de Riad Satouff le sont de sa BD, ce qui n’est pas sans faire sourire du lien épidermique qui se tisse entre les générations puisque les vieux chez Rabaté comme les jeunes chez Satouff sont animés du même et sympathique prurit charnel - s’il ne fera pas une grande rivière instille un climat de bonne humeur.

Sous la lumière perlée de l’Anjou ou plus décapante de la Corrèze, « Le petits … » vont leur bonhomme de chemins de traverse - comme chez Jean Becker ou René Fallet (1). Au rythme languide d’une voiturette électrique dont la lenteur rappelle celle du tracteur conduit par le héros septuagénaire de « Straight story » de David Lynch.

Oasis de bien-être, « Les petits … » sont ancrés dans une saison bien définie. Celle des moissons ou fin d’été qui annoncent la toute proche entrée des personnages dans le mi-3ème âge . Celui dont ils ont déjà eu, par leur expérience de la solitude et de la mort, l’intuition.

Bien loin de l’évocation documentaire de la sexualité des aînés (2), de la rigolade hollywoodienne et branchée du couple Nicholson/Keaton(3) , de la quête élégamment orgasmique de Françoise Fabian dans « La femme coquelicot » (4), du sempiternel, ridicule et pathétique décalage temporel entre l’homme vieillissant et la femme plus jeune (5), du ton dramatique du « Trop jeunes pour mourir » du coréen Park Jin-pyo, « Les petits … » sont un hymne bucolique à la libération.

Libération des préjugés et des corps qui rendent drôlement fraternels les Prévost, Vincent et Ogier lorsqu’ils envoient aux orties leurs vêtements et se montrent tels qu’ils sont.

Avec de visibles atteintes aux canons dictatoriaux du jeunisme - rides, fleurs de cimetière, affaissements musculaires, plis cutanés que l’on pardonne uniquement s’ils sont de nourrissons … - qui donnent à leur physique la consistance des traces laissées par une vie déjà bien entamée (6)

Mais pas finie pour autant.

Dans « Young@heart » de Stephen Walker, des aînés faisaient le pied de nez au temps qui passe en chantant du rock-en-roll.

Dans « Les petits … », ils le font en niq …..

Et c’est très réjouissant. (mca)

(1) "Les pieds dans l’eau " ed. Le Cherche Midi

(2) "Plaisirs d’amour entre deux âges" de Sylvie Banuls & Monika Kirchner

(3) "Something’s gotta give" de Nancy Meyers

(4) de Jérôme Foulon inspiré par le roman de Noëlle Châtelet

(5) "Les invités de mon père" d’Anne le Ney ou "Fauteuils d’orchestre" de Danielle Thompson

(6) Comme dans le superbe film d’Andréas Dresn "Wolke 9" sensiblement chroniqué sur ce site

 par notre amie Justine Gustin