Adaptation d’un livre
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LES PARTICULES ELEMENTAIRES

Oskar Roehler (Allemagne 2006 - distributeur : ABC Production)

Moritz Bleibtreu, Franka Potente, Martina Gedeck, Christian Ulmen

113 min.
13 septembre 2006
LES PARTICULES ELEMENTAIRES

Si lire Houllebecq peut donner envie de l’adapter au cinéma (*), est-ce que l’inverse est vrai ? Voir le film d’Oskar Roehler peut-il donner envie de lire « Les particules élémentaires » ?
Si oui, celui qui le lira risque d’être désarçonné voire choqué.

En effet que reste t-il, dans cette bluette qui fait penser à un sitcom vaguement érotique, de la puissance houllebecquienne d’ausculter la perversion de nos rapports à l’autre ?

Le film se centre sur les histoires d’amours de deux demi- frères, sauvés de leurs manques ou de leurs excès sexuels par des femmes dont l’érotisme, plus appliqué que débridé, n’a rien du mordant explicite qui avait suscité une houle d’émotions lors de la sortie du livre en 1998.

Une mise en scène convenue, une schématisation des flash-backs, un manque d’épaisseur dans la description des personnages ambiancent le film d’une tristesse et d’un ennui profonds sans que pour autant ceux-ci rappellent l’atmosphère neurasthéniquo-cynique du roman.

Est-ce pour ne pas sacrifier l’alimentaire (c’est-à-dire le potentiel de succès **) à l’élémentaire que le film est axé sur la facilité et les plaisirs scopiques (le sado masochisme, la masturbation, l’échangisme...) délaissant ainsi la réflexion initiée par Houllebecq sur l’inquiétante et fatale déliquescence des relations amoureuses.

Le livre n’est pas qu’un roman, il est aussi un factum et une étude sur les modifications que les idéaux de (19)68 ont amenées dans nos vies. De ces spéculations ne reste qu’un vague mélo dont la fin (avec présence du fantôme d’un personnage défunt) affadit le propos littéraire mais encore transforme l’écrivain en inspirateur du best seller de Marc Levy « Et si c’était vrai ? » sorti un an plus tard.

Comme il y a toujours quelque chose à sauver d’un naufrage, soulignons la prestation languide
de Moritz Bleibtreu (Ours d’Argent au Festival de Berlin 2005) qui colle à l’esprit déprimant de l’auteur. (m.c.a)

(*) Bernd Eichinger (le producteur allemand) a bataillé trois ans pour reprendre à Philippe Harel (qui avait déjà adapté au cinéma « Extension du Domaine de la Lutte ») son option.
(**) ce qui expliquerait le côté provocateur de la phrase retenue comme « aguicheuse » pour attirer l’attention du chaland : « J’avais envie de toutes les femmes sauf de la mienne »

site officiel du film : http://elementarteilchen.film.de/