Documentaire
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LA CONSULTATION

Hélène de Crecy (France 2007 - distributeur : Le Parc Distribution)

Luc Perino

91 min.
20 juin 2007
LA CONSULTATION

La preuve que le cinéma n’est pas la vie : on y prend plaisir à aller chez le médecin...

Dans son très beau film « La maladie de Sachs », Michel Deville relayait avec humanité le questionnement du docteur-écrivain, Martin Winckler (*), face à la souffrance, souvent silencieuse, de ses patients.

Dans « La consultation », Hélène de Crécy propose le portrait d’un médecin généraliste, Luc Perino, qui a de sa mission - soulager ceux qui viennent le consulter de leurs souffrances physiques et morales - une idée à la fois touchante et à la fois dérangeante.

Touchante en tant qu’il accorde du temps à ses patients afin de les faire accoucher de cette détresse de l’âme, souvent secrète, qui alimente leurs maux physiques. Dérangeante lorsque, outrepassant son rôle médical, il endosse celui de professeur-la-Morale ou d’adepte de Benoît XVI pour prendre parti contre une demande d’avortement (it’s bad for you) ou remettre en cause l’aide à apporter à une patiente jugée « droguée au Stilnox ».

Ces attitudes vertueuses, bien éloignées du primum non nocere - ce principe de base qui fonde l’éthique médicale - par les sentiments de culpabilité et de honte qu’elles veulent faire naître, sont impossibles, sur le plan personnel, à accepter sans broncher. Et le fait que le médecin et la cinéaste semblent les attribuer à l’impuissance thérapeutique face à la détresse qui envahit le cabinet ne les rend pas plus admissibles.

Intéressant en tant qu’approche au quotidien d’un mal-être individuel et sociétal qui fait de l’angoisse, de la solitude et du désarroi le tryptique de base de la vie moderne occidentale, éclairant en tant que diagnostic sur le monde médical - comme le sont, sur le monde scolaire rural, « En avoir ou pas » de Nicolas Philibert ou sur le monde judiciaire « Les flagrants délits » de Raymond Depardon - « La consultation » souligne la difficulté pour un documentaire de ne pas confondre réel et subjectivité. A défaut de quoi il devient malaisé de tisser frontière entre la neutralité et l’aval apporté à un discours d’un autre âge.

Pire encore cette confusion enlève au cinéaste de la clarté d’entendement qui devrait l’aider à distinguer un enregistrement de faits de son glissement vers des prises de positions captieuses.

Spectateurs, à vous d’être vigilants et de ne pas soutenir par un inconditionnel acquiescement la fausse quiétude d’un documentaire précédé des trompettes de la compassion. (m.c.a)

(*) livre éponyme paru en poche aux éditions "J’ai lu"